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AccueilA La UneEbenezer Kepombia : «Je laisse le terrain»

Ebenezer Kepombia : «Je laisse le terrain»

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C’est sur une punition que celui qui aimait faire le pitre devant ses camarades, écrit son premier sketch, ‘‘Le Boy’’. Suite à une déception amoureuse un 14 février, il écrit le feuilleton à succès «Foyer Polygamique», qui le propulse au- devant de la scène internationale. La série Madame Monsieur qui ravit l’Afrique aujourd’hui est l’aboutissement d’un long travail qu’Ebenezer Kepombia alias Mitumba, a entamé depuis le village Bazou dans l’Ouest Cameroun, où il a vu le jour en 1970. Acteur, réalisateur, producteur, Ebenezer Kepombia a ouvert ses portes à deux journaux, parmi lesquels, La Voix Du Koat. Dans son studio Chambeny Entertainment au quartier Bonamoussadi de la ville de Douala, l’homme affable et boute-en-train de 52 ans (né le 19 mai 1970 à Bazou dans le département du Ndé) a revisité pour nous son parcours. Ce fils de chasseur et de cultivatrice rêve de toute autre chose pour l’avenir. Bonne lecture. (V.T.)    

 

LVDK : Quel genre d’enfant et d’adolescent étiez-vous ?

Déjà j’ai passé ma tendre enfance à Bazou. J’y ai étudié jusqu’à mon Bepc. Après, je suis passé par Bafoussam où j’ai fait la classe de seconde. Ensuite, je suis venu à Douala. Je suis allé à Yaoundé pour les études universitaires en langue allemande. Après j’ai fait un master en communication d’entreprise. Je suis père de beaucoup d’enfants. J’étais très turbulent, très taquin, très provocateur, parce que j’avais un grand frère fort qui devait toujours intervenir pour moi. Alors, je croyais avoir sa force jusqu’au jour où j’oublie qu’il s’est déplacé et j’attaque quelqu’un. On m’a cogné jusqu’à me faire sauter une dent. J’ai pris conscience que j’étais faible et qu’il ne fallait pas compter sur les autres, mais plutôt sur soi.

LVDK : Comment arrivez-vous aux métiers de la télévision et du cinéma ?

Je crois que j’étais prédestiné à être cinéaste. J’avais choisi enseigner et le cinéma m’a choisi. Je n’ai pas fait d’efforts pour aller vers le cinéma parce qu’il était en moi. Tout commence plus ou moins en classe de 5e où le surveillant général me punit, parce que j’étais très turbulent. Quand les enseignants venaient, j’avais toujours le petit mot pour taquiner, pour faire rire le professeur ou mes camarades. A partir d’un mot que l’enseignant prononçait pendant le cours, je tournais cela en dérision en y mettant du comique et ça faisait rire. Il y avait des enseignants avec qui je poussais le bouchon trop loin et ils me mettaient dehors. Chaque fois que cela arrivait à un élève, on l’envoyait au surveillant général qui choisissait la punition. Donc on était en janvier et ma punition était d’écrire un sketch. Le surveillant général m’a dit : «Comme tu veux faire croire que tu amuses trop les gens, la semaine culturelle arrive. Tu vas écrire un sketch que tu vas présenter à l’esplanade de la sous-préfecture le 11 février.» C’était ma punition. Et c’est comme ça que j’écris mon premier sketch, « Le Boy ». Quand j’y pense, je me demande toujours ce qui m’a inspiré l’écriture de ce texte parce qu’à Bazou, je n’avais jamais vu un boy, un employé de maison de ma vie. Le Boy c’était l’histoire de quelqu’un qui est allé à l’école et n’a pas trouvé de travail. Il est employé comme garçon de courses dans la maison d’un riche et de temps en temps, il fait des répétitions à l’enfant de celui-ci. A la grande surprise de l’employeur, sa fille tombe amoureuse de l’employé de maison. Et quand le père s’intéresse de plus près à son boy, il se rend compte qu’il a été à l’école.

Que retenez-vous de vos principales expériences télévisuelles (séries), « Les Déballeurs », « Foyer polygamique » et maintenant « Madame Monsieur » ?

« Les Déballeurs », c’était le tout début. Je vais d’abord rappeler que j’ai commencé à écrire la plupart de mes scenarii de courts et longs métrages étant à l’université. C’est le cas d’une série comme « Foyer Polygamique », je m’en rappelle très bien, j’ai commencé son écriture un 14 février. C’était le jour de la Saint-Valentin. J’avais déjà un bon nombre de scenarii écrits et à l’arrivée de Canal 2 dans les années 2000, quand j’ai vu à la télé les Fingon, Tagne Condom, Man No Lap (Jean De Dieu Tchegnebe) présenter des petits sketches, des téléfilms, etc., j’ai dit que voilà en réalité ce que je sais faire. C’est vrai que Man No Lap venait déjà me voir. Il était disquaire à la « Elf », il vendait les cassettes et moi, de temps en temps, j’y animais comme l’impresario. C’était une activité que je menais aussi quand j’étais étudiant. Je présentais des mariages et autres. Et donc j’allais prendre le micro devant la discothèque de Man No Lap pour bavarder, attirer l’attention des gens pour qu’ils viennent acheter des DVD. Il a compris que j’étais intelligent et chaque fois qu’il écrivait un sketch à l’époque, il demandait mon point de vue. Du coup, je les connaissais avant de me lancer véritablement dans le métier, les Tchop Tchop, feu Ndang Ndang Ndang, Sélavie. C’est dans ma cour qu’ils faisaient des répétions. Je louais à l’époque, dans les années 97-98 dans une mini-cité à Song-Mahop (Douala III) qui avait une très grande cour, donc il y avait de l’espace pour faire des répétitions et c’était un endroit clos.

 

𝐄𝐛𝐞𝐧𝐞𝐳𝐞𝐫 𝐊𝐞𝐩𝐨𝐦𝐛𝐢𝐚 : «𝐉𝐞 𝐥𝐚𝐢𝐬𝐬𝐞 𝐥𝐞 𝐭𝐞𝐫𝐫𝐚𝐢𝐧»
Distinctions de Ebenezer Kepombia.

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A l’époque, j’avais un emploi du temps chargé. Je rentrais toujours dans la nuit, parce que j’enseignais aussi à la Kadji Sports Academy dans les après-midis. J’y donnais des cours d’allemand et de français. Je suis professeur d’allemand de formation. Les footballeurs comme les Nkoulou, Mbia, Mandjeck, Stéphane Etoundi, sont des élèves que j’ai enseignés à la KSA. Un jour, je dis à un ami, Félix Fagna, plus connu sous le nom de Souka, qu’il aille regarder là où se trouve Canal 2, ainsi, on pourra réaliser aussi les sketches que nous avons écrits. Il l’a fait. Quand l’école est finie en mai, je suis allé à Canal 2, j’ai demandé à voir un réalisateur, à qui j’ai expliqué que j’ai écrit des films qui peuvent être réalisés. On m’a envoyé Albert Jocelyn Djoukam. Il n’était pas convaincu à cause d’expériences passées où des gens venaient dire qu’ils ont des scénarios alors que c’est dans leur tête. Il m’a demandé si j’en avais d’écrits. J’ai sorti un bloc d’une vingtaine de scenarii. Il en était ébloui. Il a pris le temps de lire et il m’a ensuite expliqué qu’on allait tourner une série et non un court-métrage.

LVDK : C’est ainsi que naissent Les Déballeurs…

Il m’a demandé de regrouper des acteurs qui pouvaient tourner avec moi. C’est comme ça que je vais voir mon petit frère Big Mop –c’est en fait mon cousin, nos mères sont sœurs-. Et lui il faisait déjà dans la comédie. J’ai aussi appelé Dovie Kendo, mais elle allait au Maroc comme elle fait du théâtre, et elle m’a envoyé plutôt Anas (Tamar Tientcheu), avec qui elle travaillait déjà. Et Anas est venue avec Caro. Big Mop lui, a fait appel à Tonga qui elle est venue à la réunion avec Pétrole. Et je connaissais Tendon. Je leur donne les scenarii que j’ai écrits, on commence les répétitions. Tout ce que j’écrivais avant, je l’appelais le déballage. Au début, l’esprit était de faire un déballage des faits de la société à travers des sketches. C’est quand on tourne le premier épisode, « la vie dans les mini-cités », que Caro propose «Les déballeurs ». Et c’est Caro qui a chanté le générique après que j’ai écrit le texte. J’étais déjà très ambitieux dès le début. J’ai voulu faire un générique qui allait illustrer l’idée que j’avais.

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Après « Les Déballeurs », on a fait quelques petites séries telles que « Le conjoint d’autrui », « Les marabouts », « Les diplômés africains » qui était une série écrite par Félix Fagna. Mais il faut dire que 99% des films tournées par Les Déballeurs, c’est moi qui ai écrit. Après, j’ai pensé à faire une longue série. J’ai donc pris « Foyer Polygamique » que j’avais écrit à l’université et je m’étais arrêté à 30 épisodes. J’ai retravaillé le projet jusqu’à 52 épisodes. Et c’est la série qui nous rend plus populaire aussi bien sur le plan national qu’à l’international. C’est cette œuvre qui cimente mon identité d’acteur et de scénariste. Madame Monsieur vient après « Ennemi intime », « La veuve », « Cercle vicieux », « La belle-mère », « La Reine mère », « Habiba », « Otage d’amour ». J’ai dû acquérir beaucoup d’expériences pour arriver à « Madame Monsieur ». Et toutes ces séries étaient écrites par moi. Et je me dis, pour la première fois, je vais produire quelque chose que je n’ai pas écrit. Alors comme j’ai travaillé avec Cynthia Ngono sur « Habiba », j’ai vu qu’elle était intelligente. Entretemps, elle m’avait présenté quelques longs métrages qu’elle a écrits.

LVDK : Justement comment se passe la collaboration avec la l’actrice et productrice Cynthia Ngono ?  

 

Je l’ai donc appelée pour lui demander si elle avait des projets de série. Elle a dit oui et me les a apportés. Elle m’a apporté « Indigo » et « Madame Monsieur ». J’ai retenu ce dernier projet, je lui ai dit qu’on allait le retravailler ensemble, que j’y mette mon âme. C’est ainsi qu’on lance « Madame Monsieur ». Entretemps, je m’étais entouré de jeunes vraiment talentueux. Je voyais que les jeunes étaient plus dynamiques, ils avaient plus de vision, ils étaient plus high-tech. Parmi ces jeunes, il y avait Muriel Blanche, qui transforme même mon casting. Parce qu’au départ de « Madame Monsieur », je voulais des couples âgés. Elle a insisté pour qu’on opte pour des couples jeunes parce que le public va mieux se retrouver. Finalement, j’ai adopté son idée. Et j’ai voulu créer quelque chose de beau. Je voulais vraiment une série belle, différente de celles que j’ai eues à faire. Pour faire rêver les gens, il fallait créer de beaux décors, des costumes et qu’on fasse vraiment du 7e art, c’est-à-dire l’art qui regroupe les autres arts : culinaire, vestimentaire, musical, plastique, etc. Nous avons même créé des tableaux pour améliorer le décor. On a mis tous les arts en valeur et la mayonnaise a pris jusqu’au succès qu’on connait aujourd’hui et nous en sommes fiers.

LVDK : Et il a fallu faire adhérer des partenaires parce que tout cela a un coût…

Effectivement, la production coûte beaucoup d’argent. Et il y a quelques gens qui ont compris que j’étais puissant et qu’ils pouvaient passer par moi pour se vendre. Du coup, on a vu des stylistes se joindre à nous pour faire des contrats fifty-fifty et au fur et à mesure, d’autres entreprises se sont jointes à nous pour des placements produits et ainsi de suite. On a avancé et on est arrivés jusqu’à la fin de « Madame Monsieur » saison 3 qui est la dernière saison. Ce projet va s’arrêter là.

 

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LVDK : Vous avez déjà un autre projet en vue ?

On a toujours des projets. Même si c’est vrai qu’à la fin de « Madame Monsieur », il me vient à l’idée d’abord de me reposer. Mais j’ai la pression du public, de mes employés, de tous les techniciens avec qui je collabore : « Tu te reposes comment ? Nous on fait comment ? »

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LVDK : S’il vous était demandé de noter ces différentes saisons de « Madame Monsieur », laquelle vous aurait le plus marqué ?

Toutes les saisons m’ont marqué. Chacune avait ses spécificités. La saison 1 était une série. Chaque épisode avait son histoire et c’était à 80% comique. Il y avait aussi du glamour, les personnages étaient bien vêtus, élégants, beaux. Mais pour la saison 2, on a changé le rythme, on est passé à un feuilleton. Nous voulions avancer et expliquer vraiment les problèmes de couple. Il devenait très difficile de continuer à le faire en série, c’est-à-dire choisir un thème par épisode. Sincèrement, on aurait été en manque de thèmes sur lesquels travailler. J’ai préféré m’orienter sur le feuilleton avec une histoire qui se poursuit au fil des épisodes. Dans cette saison 2 donc, il y avait du suspense, des rebondissements. C’était plus accrocheur que la saison 1. Il s’agissait de faire vibrer les cœurs, on y a donc mis du drame. Et on est arrivé à la saison 3 où on a ajouté l’horreur. C’est la petite touche en plus de cette dernière saison. Elle garde les mêmes éléments que la saison 2, mais on y a ajouté de l’horreur. Les gens ont eu peur  avec certaines scènes.

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LVDK : Est-ce que les gens arrivent à séparer « Mitoumba » d’Ebenezer Kepombia ?

Même en tant qu’Ebenezer Kepombia, je suis connu. Mon nom fait l’objet des épreuves de certificat d’études, de concours d’entrée en sixième et autres concours officiels. Dans une épreuve de concours de recrutement à Aes-Sonel, on demandait quel est le vrai nom de Mitoumba. Si on est arrivé jusque-là, c’est qu’on a fait fort. Mais le nom Mitoumba est plus prononcé un peu partout où je vais. Certains, pour montrer qu’ils me connaissent bien ajoutent Ebenezer Kepombia quand ils m’appellent.

 

LVDK : Comment votre carrière affecte-t-elle votre vie sociale et familiale ?

J’avoue que je n’ai pas trop de temps pour mes proches. Ça fait que je suis un peu recroquevillé sur moi-même. Je n’ai pas trop de temps pour les balades, pour ma famille. Parce que je suis tout le temps sur les plateaux, en voyage parce qu’il faut aller dans les festivals ou les marchés de films. Je pense que le cinéma m’absorbe et m’a séparé même de beaucoup d’amis, parce que je n’ai pas le temps de leur rendre visite. Ça m’occupe trop parce que je suis au début, au milieu et à la fin de toutes mes œuvres. Ce qui rend ma tâche plus difficile. Je travaille en permanence. Pour « Madame Monsieur » par exemple, maintenant on est à la phase de la commercialisation et je travaille dessus. Avant d’y arriver, on a fait la pré-production, c’est-à-dire qu’il faut d’abord écrire. Je l’ai fait avec Cynthia Ngono. J’écris les scenarii, je développe le séquencier, je lui envoie, elle met les dialogues, depuis la saison 2. Ensuite je dois aller chercher les maisons où on doit tourner, prendre contact avec les stylistes, imaginer la politique de la production, travailler avec les techniciens en amont pour qu’on s’accorde sur ce qu’on aura en définitive, décider sur le genre de matériel avec lequel on va travailler. Ensuite, il y a la production, la post-production. Après, on est au Cameroun, il n’y a pas de société de distribution. Il faut courir après les chaines de télé et autres. Donc ça m’absorbe vraiment. Ça affecte ma vie familiale parce que je n’ai pas trop de temps. Et le peu de temps que j’ai vraiment de libre, je le consacre entièrement à mes enfants et quelques rares fois, on peut rendre visite à quelques amis. Et aussi, quand j’ai un peu de temps, je fais de l’agriculture. Je vais dans mes plantations. Je cultive des bananiers, des ananas.

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LVDK : Quel regard posez-vous sur l’évolution du métier au cours de ces dernières années ?

L’avènement des nouvelles technologies a créé un bouleversement dans le travail. Non seulement ça a facilité le travail de la réalisation même déjà au niveau du Cameroun. Et il y a surtout une jeunesse très entreprenante et très rêveuse. Pas un rêve utopique, mais des rêves constructifs. J’ai connu des jeunes qui travaillent beaucoup. Et tous ces jeunes, parce qu’ils ont de la ferveur, du dynamisme, de la créativité, avec les nouvelles technologies qu’ils maitrisent mieux que les vieux, ont contribué à améliorer la qualité de nos productions. Avec les nouvelles caméras, c’est plus facile de faire de bonnes images et rapidement. L’évolution du cinéma camerounais aujourd’hui s’appuie sur deux choses : les nouvelles technologies et le dynamisme des jeunes. Je m’entoure de jeunes. De plus, je suis quelqu’un qui s’actualise (se met à la page), c’est ce qui fait ma force. Je suis un homme de l’heure, je m’adapte à la situation. Et je pense que ma carrière d’enseignant m’a aidé aussi. Parce que l’enseignant est celui-là qui ne vieillit jamais. Il doit avoir le langage adéquat de l’époque où il se trouve pour faire passer son message, son enseignement.

Réconciliation, amour, rire, bonheur…C’est sur ces notes que le rideau est tombé sur la troisième saison de la série camerounaise à succès, Madame Monsieur.
Madame Monsieur, clap de fin

LVDK : Vous parlez de jeunes dynamiques et de vous qui avez beaucoup de travail. Pensez-vous alléger cette charge de travail justement grâce à ces jeunes ?

Oui, dans les années à venir, je vais me retirer vraiment. Je pense mouler mon équipe qui va faire des productions sans moi, c’est mon objectif. D’ici deux à trois ans, je laisse le terrain. Je vais rester producteur toute ma vie, sauf que j’aurai des équipes de travail qui auront compris mon système, que le cinéma c’est l’art et le business. Parce que le gros souci que nous avons est que la plupart des réalisateurs sont en même temps producteurs. Et c’est un danger. Quand vous ne parvenez pas à séparer les deux casquettes, vous ne pouvez pas vous en sortir. Les jeunes, quand ils sortent de l’école, ils rêvent de faire de beaux films qui captivent, qui créent toutes les émotions pour que l’œuvre soit parfaite, avec de belles images, un beau son, etc. mais ils oublient qu’un film est un bien de consommation : je vends à qui ? c’est là qu’il y a problème.

LVDK : Justement, parlant de business, qu’est-ce qui fait le succès de Nollywood et que doit faire le Cameroun pour connaitre une telle réussite ?

Nollywood a la force d’avoir une grande population. Au début de la production des œuvres cinématographiques jusqu’à présent au Nigeria, les DVD sont ce qui fait le marché. Dans un pays où il y a plus de 200 millions d’habitants, si vous produisez un film et que vous vendez le DVD à 0,5% de la population, vous allez vous retrouver au moins à cinq millions de personnes à qui vous aurez vendu. Donc un producteur aura mis les mêmes moyens, parfois moins que vous le Camerounais pour produire un film, mais dans son exploitation, il a plus d’argent que vous. Nous sommes 25 millions de Camerounais et peut-être seulement un million vont acheter votre œuvre alors qu’au Nigéria, 20 millions sur les 200 millions d’habitants peuvent acheter votre œuvre. En économie, on dit que la population est un facteur de développement économique. Et s’il faut parler de qualité entre les productions de nos deux pays, je ne peux pas dire qu’il y a une différence. Vous allez voir 100 films produits en six mois au Nigeria et seulement 10% seront bons. Il y en a qui sont du vrac qui ne sortent pas du pays, et parfois même pas de l’Etat du Nigéria où ça a été produit.

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A côté de la force du nombre, le Nigeria est devenu une industrie avec tous les facteurs qui interviennent. Ici, nous faisons tout. Même pour avoir une maison où tourner, c’est le parcours du combattant. Là-bas, on a construit des cités de cinéma. Ils ont même des studios de cinéma. Ici, on a des maisons de production. Les studios sont des bâtisses bien érigées qu’on transforme pour faire des décors. Les Américains sont les experts.

Autre facteur important, c’est la langue. L’anglais est la langue la plus répandue dans le monde. « Madame Monsieur » est passé par exemple en langue anglaise pour conquérir plus de marchés. Donc nous allons continuer à travailler et nous allons avancer à notre rythme. Ne pensez pas que le Cameroun va un jour être comme les Etats-Unis par exemple. Pour atteindre ce niveau, il faut qu’on change la mentalité des Camerounais.

Entretien avec Valgadine TONGA

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