Dr. Fridolin Nke a été expulsé des salles de cours et des amphis le 2 juillet 2018 à l’université de Yaoundé I. Selon cet enseignant-assistant au département de Philosophie de la Faculté des Arts, Lettres et Sciences humaines (F.A.L.S.H), cet acte des autorités académiques viole la décision du tribunal de première instance du Centre administratif du Mfoundi du 20 juin 2017. La justice lui a, pourtant, donné gain de cause, en lui permettant de reprendre service. Retour sur les contours de cette affaire!

C’est un rebondissement de l’affaire opposant Dr. Fridolin Nke au chef de département, par ailleurs Doyen de la Faculté des Arts, lettres et sciences humaines de l’Université de Yaoundé I. En début de semaine, l’enseignant-assistant a été expulsé des salles de cours et amphis par ses collègues alors qu’une décision de justice avait été rendue au tribunal le 20 juin 2018. En effet, la sentence du juge au tribunal de première instance du Centre administratif du Mfoundi sanctionnait alors la reprise de service de F. Nke. A la question de savoir pourquoi cet universitaire est victime de l’expulsion des salles de cours de l’université de Yaoundé I le 2 juillet 2018, le spécialiste des questions d’éthique et d’épistémologie répond: «Je constate simplement qu’ils refusent d’appliquer l’arrêt de la Cour Suprême. Bien évidemment, j’ai eu gain de cause au niveau du tribunal administratif de Mendong. Au niveau de la cour suprême, on a débouté le ministre de l’Enseignement supérieur. On m’a donné raison. On a demandé qu’on applique l’ordonnance qui m’autorise à retourner à l’université».
L’enseignant de Philosophie avait été accusé en mars 2016, un an après son recrutement comme assistant par les autorités académiques, de «viol, de harcèlement sexuel et de manquement à l’éthique professionnelle». Toute chose qu’il bat en brèche et qu’il considère comme une cabale ourdie contre lui. Après avoir intenté un procès contre ses pourfendeurs et, a fortiori, contre le chef de département de Philosophie, le recteur de l’Université de Yaoundé I et le ministre de l’Enseignement supérieur, la décision de justice lui a été favorable. «Ils ont monté une personne que je connais, une certaine Ngo Hagbe. Elle m’avait appelé pour me dire que le chef de département lui a demandé de rédiger une plainte pour viol et harcèlement. Tous ces éléments sont au niveau de la justice. Mon propre chef de département ne voulait pas me voir. Donc, ils ont orchestré un ensemble de choses», relate, la mine ulcérée, l’incriminé.
Résidence surveillée
Le fait, pour les autorités académiques de l’Université de Yaoundé I, d’avoir cloîtré Nke dans son bureau est, ajoute, l’homme de sciences, préjudiciable tant cet acte participe à ternir l’image de la mère des universités d’Etat du Cameroun. D’où l’illustration ci-après: «Elles (les autorités académiques) refusent vraiment que j’y ai accès. Tous les étudiants qui sont dans ma spécialité sont perdus. On leur a assigné des petits étudiants de Master1 pour les diriger, pour les suivre. Donc vraiment, ce n’est pas le fait de m’assigner à résidence surveillée qui me dérange, mais le fait qu’on monte mes propres collègues contre moi. Je trouve que c’est ridicule; ce n’est pas l’image que j’avais de l’université quand je venais ici». Toutes les tentatives entamées depuis le 4 juillet 2018 pour entrer en contact avec Lucien Ayissi, Doyen de la Faculté des Arts, lettres et sciences humaines, sont restées vaines. Aussi une action initiale a-t-elle été étrennée pour avoir la version du recteur de cette instance universitaire. Mais en vain! Le chef de la cellule de communication nous a plutôt orientés vers le chef de département de Philosophie, qui est, parallèlement, Doyen de cet établissement. La démarche entreprise pour accéder à L. Ayissi est alors restée infructueuse.
Abus de pouvoir
En rappel, c’est le 20 juin 2018 que des vigiles venus du rectorat ont interdit à Nke d’accéder à son bureau. Sur le champ, l’universitaire a saisi le cabinet d’avocats Mpeck, Ntsama et Bell. Ce conseil de défense du Philosophe a, illico presto, écrit au Doyen de la F.A.L.S.H. avec ampliations au recteur et au ministre de l’Enseignement supérieur (Minesup). Dans cette correspondance, Me Mpeck énonce : «Je me dois de vous rappeler, si de tels faits s’avéraient établis, qu’il s’agit, une fois de plus, d’une violation flagrante de la loi, plus précisément d’un refus caractérisé et manifeste d’exécuter l’ordonnance numéro 20/Ose/Cab/Pta/Ydé/2017 rendue le 20 juin 2017 par le président du tribunal du Centre administratif du Mfoundi. Sachant qu’une procédure judiciaire est déjà pendante à votre encontre pour des faits similaires, je vous saurai gré, en cas de méprise, voire d’excès de zèle de certains de vos collaborateurs, de bien vouloir les inviter à respecter et à exécuter, purement et simplement, la décision de justice sus évoquée».
Une procédure au pénal a, par ailleurs, été préparée contre Mazzadou et Minkoulou, tous deux enseignants audit département, mais elle n’a pas été déposée, n’ayant pas reçu l’onction de Nké. L’universitaire, qui s’est constitué partie civile, sollicite l’ouverture des discussions directes avec le ministre de l’Enseignement supérieur. Le procès au pénal contre Jacques Fame Ndongo, Alamine Ousmane Mey, Maurice Aurélien Sosso, Lucien Ayissi, Abane Engolo et contre Mme Mbock se poursuit donc au Tpi de Yaoundé Centre administratif. Ces personnalités académiques ont été inculpées pour «excès de pouvoir» et «refus d’appliquer une décision de justice devenue définitive» suite à une plainte de F. Nke. Le 12 juin 2018, se tenait, d’ailleurs, une 2ème audience de ce procès. Au cours de ladite audience, l’avocat des prévenus s’est constitué. C’est Me Ngapouth qui va défendre toutes ces personnalités. Me Mpeck a payé la consignation et le procès a été renvoyé pour identification formelle des prévenus. La prochaine audience a lieu le 14 août 2018.
Serge Aimé BIKOI