Dans une correspondance, les Vietnamiens couvrent d’accusations le milliardaire camerounais. Et sollicitent l’intervention du chef de l’Etat Paul Biya.
Que se passe-t-il à Viettel Cameroun S.A., plus connu sous l’appellation commerciale Nexttel ? Pour sûr, le réseau est on ne peut plus brouillé entre la direction générale du groupe vietnamien Viettel Global Investment JSC et son partenaire camerounais Baba Ahmadou Danpullo. Promoteur de Bestcam, Danpullo est actionnaire minoritaire de Viettel Cameroun S.A (30%) contre 70% de capital détenus par les Vietnamiens. L’homme d’affaires camerounais est accusé depuis quelque temps par la direction générale de vouloir s’accaparer la boite. Dans une correspondance du 10 septembre 2018, adressée au président de la République Paul Biya, le Directeur général, Do Manh Hung, énumère les raisons de son inquiétude.
Elle commence en 2004. La direction générale est ahurie par une décision de Justice. A la demande de Monsieur Danpullo, «prétendant agir comme président du Conseil d’administration, c’est-à-dire sans qualité», le juge des requêtes du Tribunal de Première Instance de Yaoundé-Ekounou rend cette ordonnance: «Ordonnons la co-signature du Directeur général et du Directeur général adjoint camerounais Monsieur Bayi Moise Bienvenu…et celle des directeurs régionaux avec leurs adjoints camerounais sur tous les comptes bancaires et les engagements (contrats) de la société Viettel Cameroun S.A ou tous comptes et engagements au nom de Nexttel. »
Droit de signature
D’autres actes, jugés illégaux par les Vietnamiens, vont s’enchaîner. Cas de figure, en 2018, «sans qu’aucun conseil d’administration ni assemblée générale n’ait saisi d’un dysfonctionnement quelconque de la société», lit-on sur le document, «la partie étrangère dans l’investissement a été surprise de recevoir notification d’une ordonnance de justice N°700 rendue le 02 août 2018 par le Président du Tribunal de Première Instance de Douala-Bonanjo, accordant la signature des documents et paiement au président du Conseil d’administration, concurremment au Directeur général et au Directeur général adjoint.» Do Manh Hung soutient pourtant qu’en tant que Pca, Danpullo n’a pas pareil droit de signature. Il juge la décision du tribunal de «grosse entorse à la gouvernance d’entreprise, une entorse aux pouvoirs des organes prévus par l’Acte uniforme Ohada sur les sociétés commerciales et les groupements d’intérêts économiques. Cette décision de justice vient concrétiser les ambitions d’accaparement des pouvoirs du Directeur général par le président du Conseil d’administration.»
Une odeur de corruption
Le Dg Vietnamien enfonce le clou. Sa lettre dénonce un acte de corruption de la partie camerounaise. «Notre groupe a été surpris, écrit Do Manh Hung, de recevoir par voie diplomatique des ambassades du Cameroun au Nigéria et en Chine une demande de paiement de la somme de 92.800.000.000 (quatre-vingt-douze milliards huit cent millions Fcfa) formulée contre nous par le président du Conseil d’administration qui prétend réclamer le remboursement d’un montant qu’il aurait débourser à titre de corruption pour influencer le processus d’attribution de la licence 2G et 3G à Nexttel.»
Les Vietnamiens disent se sentir en minorité dans leur affaire. Le contrôle serait passé au camp de l’actionnaire minoritaire. Qui ferait prévaloir au niveau judiciaire, «l’argument de notre nationalité étrangère pour mettre la main sur nos investissements». Dans sa correspondance, le Dg dénonce un réaménagement illégal de l’organigramme, effectué par son Pca. Aussi, la nomination par le Pca des cadres supérieurs, le redéploiement des effectifs du personnel «sans égard aux attributions du directeur général qui représente l’actionnaire majoritaire.» Confronté au refus de dialogue de l’homme d’affaire camerounais, les Vietnamiens s’en remettent à l’arbitrage de Paul Biya. «Nous n’avons de recours que de solliciter votre haute intervention à l’effet d’instruire tous les services compétents la protection de nos investissements et le traitement équitable et juste de nos droits.» Nos tentatives pour entrer en contact avec Baba Danpullo -réputé pour son extrême discrétion- sont restées vaines jusqu’ici.
Cette affaire commerciale pourrait vite virer en incidence diplomatique. Global Viettel Investment Jsc étant une entité publique, avec les actions appartenant à l’Etat. Affaire à suivre !
Daniel NDING
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