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Nathalie Yamb : «Nos médias hélas se contentent de répéter ce que les médias des autres ont dit,… au lieu de véhiculer un narratif qui soit à notre avantage» 

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Invitée de marque de la semaine des Panafrican Awards qui s’est déroulée du 10 au 16 décembre 2022 à Douala, Nathalie Yamb la redoutable femme politique qui donne des insomnies aux ennemis de l’Afrique, a entretenu les panafricanistes venus nombreux, sur le rôle des médias occidentaux en Afrique; non sans indiquer des voies de sortie. Ci-dessous, une partie de son intervention.

Quel regard portez-vous sur le rôle  des médias occidentaux en Afrique et leur influence ?

Les médias de l’étranger ont tous un rôle à jouer. Il faut quand même que nous sachions que la guerre d’influence ne se limite pas aux médias. Alors,  on va en parler parce que l’élément le plus visible, c’est la guerre d’influence médiatique. Mais, il y a un volet politico-économique qu’il nous faudra aussi évoquer par la suite, parce qu’elle est  beaucoup plus sournoise et la bataille est également très rude. Les médias camerounais ou africains,  puisque j’ai l’habitude de parler de l’Afrique, je considère que l’Afrique est chez moi. Il y en a qui jouent leur rôle et je suis heureuse d’être assise à côté de Jules Domche qui pourra vous dire plus en détail sur le prix qu’ils ont eu à payer pour entrer de plain-pied dans le combat que nous menons. Mais, il y a Afrique Média et d’autres médias ici au Cameroun qui soutiennent le combat que nous menons.

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Pourquoi les puissances occidentales investissent-elles autant de moyens dans ces médias ?

Nous avons une armada constituée non seulement des médias publics français en l’occurrence et occidentaux en général. On a en face de nous des médias comme TV5, dans lequel l’État français a des parts. On a en face de nous la presse qui est subventionnée à hauteur de 400 à 500 millions d’euros par l’État français. Nous avons en face de nous, les médias étatiques publics de nos Etats qui malheureusement se contentent très souvent, de répéter ce que les médias des autres ont dit, au lieu d’aller faire le travail de recherche ou d’aller faire le travail de documentation et de véhiculer un narratif qui soit à notre avantage.  Ce dont nous parlons aujourd’hui, c’est  la guerre d’influence et je voudrais vous remarquer que le mot influenceur, je pense que beaucoup dans la salle ont entendu dire  que j’étais l’influenceuse à la solde de Poutine, de la Russie, de la Turquie, de la Chine, peut-être parce que j’ai des yeux  un peu bridés, ça peut prêter à confusion (rire). Je  suis influenceuse de tout le monde sauf  de l’Afrique. Le mot influenceur à commencer à être utilisé par nos adversaires dans le but de nous ridiculiser, parce que les influenceurs, au début, c’était des personnes qui, sur les réseaux sociaux, faisaient des placements de produits pour des marques de beauté.  Emmanuel Macron a commencé à utiliser le mot influenceur pour décrire ceux qui se battent pour l’émancipation de l’Afrique. C’était pour dire que, ce sont des petits gens qu’on paie pour venir être des mercenaires. Ce mot est apparu dans le champ lexical politique très récemment, depuis 2020, je dirais un peu après le  discours que j’ai tenu à Sotchi, qui m’a valu d’être dans le collimateur. Mais, la guerre d’influence dans laquelle nous sommes, existe depuis très longtemps, et nous en payons un prix qui est énorme.

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On voit bien que l’Afrique est prise dans l’étau des médias occidentaux, que faut-il faire ?  

C’est juste une question de volonté. Encore faut-il disséquer qui est enfant de l’Afrique, parce que l’Afrique, c’est vous, c’est nous, mais c’est aussi nos dirigeants, c’est nos entrepreneurs, c’est une diversité de personnes. En fait, nous avons en face de nous un système. Et on ne peut défaire ce système que si, nous-mêmes nous nous organisons en système. Mes prédécesseurs ont parlé de l’état des lieux dans le monde des médias et de la façon dont on doit traiter l’information. Si on peut résumer cela en une phrase, je dirais que c’est nous qui ne voulons pas;  ce n’est pas eux, mais, c’est nous. On sait tous ce qu’il faut faire. Je vais le répéter, regardez-moi,  je fais 1m63 (rire). Je ne regarde jamais leurs journaux. Je n’ai pas de télévision, du moins, j’ai une télé à la maison, mais elle ne me sert à rien, je ne l’ai  jamais allumée. J’ai résilié mon abonnement canal en 2017, j’étais encore à Dijon. Je n’écoute pas la radio des autres, les gens me demandent souvent comment vous faites pour être informé ?  J’étais à la recherche de l’information.

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Moi ma page facebook  a 475.000 ou 477.000 followers. RFI, sa page Facebook c’est 4,5 millions de followers, soit 10 fois plus que ma page. Et pourtant,  tout un gouvernement français trouve important de prendre un arrêté pour m’interdire d’aller en France. J’entends chaque fois le même narratif, c’est-à-dire que  nous sommes au service des autres et vous vous rendez compte que si une, deux ou trois  personnes ont cet effet sur tout un État, cette puissance soit disant qu’est la France, qu’est-ce que ça pourrait être , si nous nous organisions et que ce ne soit plus des individus qui soient devant, mais que ce soit un système que l’on oppose à un autre système.

Les Africains ne sont-ils pas victimes de leurs propres turpitudes, parce que ces médias trouvent une oreille attentive auprès de nos populations au détriment des médias locaux ?

Moi, je  suis assez déçue. Souvent, j’appelle sur mes réseaux sociaux, j’appelle des gens pour leur dire, désabonnez-vous de Rfi, je ne suis pas abonnée à Rfi. Ça ne m’empêche pas de temps en temps d’aller visiter leur page, parce qu’ils visitent aussi mes pages. Moi aussi, je vais sur leur page et quand ils donnent une information qui est complètement infondée, je m’en vais, je corrige l’information en commentaire. Mon commentaire a généralement 2,3, 4 fois plus de réactions que leur poste initial. Mais vous regardez les followers de Rfi, ce sont ceux-là même qui se disent panafricanistes, qui veulent s’émanciper. Ils disent qu’ils en ont marre de la France, mais ils sont toute la journée en train d’écouter Rfi, regarder France 24. Je ne comprends pas pourquoi. Il faut qu’on soit cohérent à un moment donné. Personne en France, n’écoute ces médias. Personne en Amérique n’écoute Voice of America. Personne en Allemagne n’écoute Deutschweller. Ce sont des outils de propagande qui ont pour but de véhiculer la propagande française, de véhiculer le narratif français et défendre les intérêts de la France. Ils n’ont pas besoin de faire ça avec leur propre population. Donc c’est nous qui sommes la cible.

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Il y a 3 semaines, on nous a annoncé que le Quai d’Orsay va de nouveau lancer un nouveau média à l’attention de l’Afrique. Je me suis faite bloquée par plusieurs ministres en France, parce que quand on engage la discussion, ça ne dure généralement pas. Ils  m’ont interdit de séjourner chez eux. Ils peuvent m’interdire leurs comptes, ça ne m’intéresse pas, mais vous les voyez, ils vous répètent à longueur de journée que l’Afrique toute entière représente moins de 4% du commerce extérieur français. Nous sommes des tout-petits. Nous ne sommes rien, mais à cause de nous, on dépense 30 millions d’Euros  pour ouvrir une fondation pour la démocratie, on dépense 30 millions d’Euros  pour créer un nouveau média à l’attention de l’Afrique.

Pensez-vous que le combat panafricain porte ses fruits ?

Je trouve qu’on a réussi quelque chose, nous  les influenceurs (rire). Je n’aime pas le mot mais comme c’est collé, on va prendre ça. On a réussi quelque chose. C’est de pouvoir commencer à déconstruire le narratif des médias officiels en étant nous-mêmes bannis de ces médias officiels parce que les pleurs que ces gens déversent  toute la journée, chaque discours de Macron, revient sur nous. Les ambassadeurs de France ont dorénavant une feuille de route qui leur dit qu’il faut aller faire des séminaires sur la désinformation, sur les fake news. Ce sont les premiers propagateurs de fake news du monde, et puis c’est eux qui viennent dire non, nous on ne sait pas mentir. Aujourd’hui, les ambassadeurs sont devenus des influenceurs. C’est leur travail, ils sont venus nous rejoindre dans le coin où ils nous ont confinés.  On a commencé malgré le fait que nous ne soyons pas dans les médias standards, à pouvoir déconstruire leur narratif. Ce qu’on nous reproche à nous, ce n’est pas d’avoir des armes et de financer des rébellions ou et cetera. Nous ouvrons les yeux. Des gens nous écoutent. Il va falloir que nous-mêmes, nous décidions de faire ce qui est nécessaire. Au  sortir  de ces conférences, chacun de nous devrait se dire que le matin, je n’écoute plus Rfi. Le soir, je ne regarde pas France 24. Je ne lis pas Jeune Afrique,  alors ça diminuerait l’intoxication qui est dans nos esprits.  Mais nous avons une force aujourd’hui. Nous pouvons nous organiser, nous pouvons décider de déchirer le voile du mensonge, d’arracher les masques de la propagande et de commencer à propager la vérité.

 Où est-ce-que vous prenez votre courage ?

Où est-ce que je trouve le courage de faire ça ? C’est très simple, je pense que mes rêves sont plus grands que mes peurs. Quand vous avez un rêve, rien ne devrait pouvoir vous en détacher. Alors, je ne me dis pas que c’est facile. J’entends mes jeunes frères qui disent nous qui ne sommes rien, nous qui n’avons rien, d’abord je n’aime pas cette façon de parler de soi. Vous êtes quelqu’un. Ce n’est pas parce que vous n’avez pas les moyens comme d’autres, que vous n’êtes rien. Il faut d’abord commencer à vous regarder et à avoir l’estime de soi parce que les autres ne vous donneront pas cette estime de soi. Il faut rêver grand. J’ai toujours rêvé quand j’étais beaucoup plus jeune, que lorsque je  deviendrai mère, mon enfant puisse vivre en Afrique, la vie que d’autres ont ailleurs.

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Malheureusement mon fils à aujourd’hui 23 ans, et ce n’est pas encore une réalité que nous avons chez nous. C’est l’option de combat dans lequel nous nous sommes engagées, cela nécessite des sacrifices très lourds. Chacun  d’entre vous est là, on dit on veut ceci, on veut cela, il faut savoir que dès la minute où vous mettez en œuvre un de nos plans d’action, vous allez devoir en payer le prix. Au niveau des États, on vous coupe les financements, l’aide publique au développement qui n’aide jamais. On vous ostracise. On vous colle des résolutions du Conseil de sécurité dans les temps, on vous malmène. Au niveau des individus, les acteurs économiques, médiatiques, politiques des enseignants, si vous essayez de sortir du cadre, on vous sanctionne.

Décryptés par Blanchard BIHEL 

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