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Dr. Jean-Marie Biada : «Seuls les promoteurs de ces crypto-monnaies font fortune. Les épargnants n’ont rien»  

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L’économiste Dr. Jean-Marie Biada, expert en fiscalité et expert formateur certifié Onudi en Diagnostic  et mise à niveau des entreprises lève les zones d’ombre qui entourent la décision «salutaire» du président de la Commission bancaire d’Afrique Centrale, interdisant les cryptomonnaies dans la sous-région.

LVDK : Le président de la Commission bancaire de l’Afrique centrale et Gouverneur de la Beac vient d’interdire les crypto-actifs dans l’espace Cemac. Il évoque comme motif, une déstabilisation du système bancaire et financier par les crypto-actifs. Y a-t-il vraiment à craindre des crypto-actifs ?  

La Commission bancaire d’Afrique Centrale (Cobac) est une institution de surveillance des activités du secteur de la finance pour être plus précis, donc tout ce qui est microfinance, activités des banques. A l’époque, la surbancarisation qui est intervenue dans ce pays et qui a vu la faillite en cascade des banques était  due au fait que le secteur bancaire était laisser à lui-même. Si vous laissez que le banquier prenne l’argent qui ne lui appartient pas, pour aller faire de la spéculation, c’est extrêmement dangereux. Lorsque Lehman Brothers a sombré en 2008, c’était des faillites en cascade. Les actifs financiers au niveau du Cameroun sont connus. Une action achetée au niveau d’une banque est un actif financier et qui peut donc être revendu notamment à la Bourse des Valeurs mobilières de l’Afrique Centrale à Douala. Les obligations du trésor et assimilables (Ota), les Bons du trésor et assimilables (Bta), les Bons de trésor à coupon zéro…sont des actifs financiers qui existent chez nous. On ne voit pas dans cette liste les crypto-actifs. Le Gouverneur de la Beac et qui est par-dessus le président statutaire de la Commission bancaire de l’Afrique Centrale est en train de sonner l’alerte. Parce que si le banquier prend l’argent des clients pour aller le recycler dans une activité que le client ne connait pas, et qu’il perd cette épargne, que fera-t-on ? La Cobac c’est six pays, plus la France, qui ont décidé de mettre cette commission sur pied.

LVDK : La décision du président de la Commission, Abbas Mahamat Tolli prévaut sur les lois et décrets nationaux ?

Les textes qui ont été ratifiés par les parlements des six pays de la Cemac deviennent des textes surpra-légaux, au-dessus de la législation domestique. Donc un texte de la Cobac est au-dessus des textes nationaux. C’est la raison pour laquelle la loi portant promotion des crypto-monnaies en Centrafrique est contestée par la Beac, au motif que ce n’est qu’une loi interne. Une décision prise par la Cobac ne peut pas être mise en difficulté par une disposition interne à un pays de la Cemac.

LVDK : Qu’est-ce qui peut justifier cette frilosité à l’endroit de la cryptomonnaie ?

La cryptomonnaie fait peur en ce moment parce que c’est nouveau. Personne n’aime sauter dans l’inconnu. De plus, c’est une monnaie désincarnée. On connaît l’arbre qui produit la mangue, l’avocat… L’arbre qui produit l’argent c’est la banque centrale. L’arbre qui produit la cryptomonnaie n’est pas encore connu. Il y a donc toutes les raisons de s’en méfier. De ceux qui ont mis leur argent dans la cryptomonnaie sans connaître les soubresauts, beaucoup sont en train de déchanter, sur 2 ou trois qui ont réussi. Si vous regardez les gens qui parlent de cryptomonnaie, à la base ils n’ont jamais touché 200.000 Fcfa ou 300.000 FCfa par mois de leur effort personnel. Ils se retrouvent subitement à la tête de milliards, ils achètent des immeubles de gauche à droite, sans pouvoir rembourser les clients. La cryptomonnaie en l’état actuel, vu l’écosystème qui gère la production des signes monétaires dans la Cemac ou ailleurs, suscite plus de suspicions et de peur. Il n’y a même pas de banque qui produit la cryptomonnaie. Il y a plus de 16.000 cryptomonnaies, notamment le bitcoin. 16.000 signes c’est énorme. Il y a quelque chose derrière. Le diable se trouve dans les détails.  Nous avons connu à la fin des années 90 Leadership Academic qui a été une catastrophe. Les gens ont perdu beaucoup d’argent. La Milda a été la catastrophe, pareil avec Mekit. Et on se rend compte que ce sont les promoteurs de ces cryptomonnaies qui font fortune. Tous ceux qui apportent leur argent n’ont rien.

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LVDK : Plusieurs observateurs voient tout de même la main de la France derrière cette décision d’Abbas Mahamat Tolli?

La Beac n’a pas au Conseil d’administration uniquement la France. C’est vrai qu’il y a un bureau de la Beac  qui a été ouvert à Paris, et je suis personnellement contre. Il faut le fermer, le siège c’est au Cameroun. La Beac appartient aux Etats membres de la Cemac, plus la France. La France a un ou deux censeurs au niveau de la Beac. La France détient encore le compte de réserve d’exportation. Donc, voir derrière cette sortie la main de la France, pourquoi pas ? N’oubliez pas que la France est en difficulté. Le covid a sévi pendant très longtemps. Elle a engagé près de 600milliards d’euro pour financer le Programme de chômage partiel en France qui fait que lorsqu’une entreprise est éligible à ce programme, les employés qui sont à la maison touchent 86% de leur salaire. Le plan de programmation militaire pour rénover son armée, c’est de l’argent. Les Africains ne doivent pas s’attendre à ce que la France se lève un bon matin et décide de leur rendre tout l’argent qu’elle a puisé en Afrique, tout ce qui a été pillé dans nos musées.

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Elle ne le fera jamais. On l’a vu avec le remboursement de la dette, dans le cas des fonds PPTE. On a annulé la dette du Cameroun, mais la France a réussi le génie de mettre sur pied un compte où le Cameroun ne devait plus payer de l’argent à la France, on devait mettre cet argent à la Beac. Mais il y a un comité parité qui a été mis sur pied pour indiquer prioritairement les projets qui seraient financés par cet argent mis à la Beac. On s’est rendu compte que toutes les entreprises adjudicataires des marchés lancés n’étaient pas loin de la France. Autrement dit, l’argent ne va pas directement au trésor français, mais ça remonte par les filiales des entreprises françaises basées dans nos pays. La France ne va jamais décider de fermer le compte d’opérations et vous verser les 12.000milliards qui y sont. Jamais. Tout ce que nous gagnons en devises, en dollars, en euro…est déposé au trésor français. La France peut donc avoir dit un mot au président de la Commission. Nous ne nous attendions pas à ce qu’elle dise le contraire, ce d’autant plus qu’elle  perd pied en République Centrafricaine. Remarquez que cette sortie du président de Cobac est la suite de sa correspondance  adressée à la Centrafrique. Mais le plus important c’est notre position. La mienne c’est la prudence. On n’avait pas besoin de la France pour sonner l’alerte. Pour moi c’est un geste de salut.

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LVDK : A qui profite la décision du président de la Cobac ?

De mon avis, son acte profite aux épargnants. Figurez-vous que ces instructions ne furent pas données, et qu’on se retrouve avec des banquiers qui prennent les dépôts consolidés des épargnants sur leur guichet pour se livrer à la spéculation, acheter des crypto-actifs. Si cet argent est perdu, c’est fini. On ira encore déranger l’Etat pour indemniser les épargnants. On a pillé une banque au Cameroun, avec 50milliards Fcfa de perdu. A la fin ce sont les épargnants qui ont failli trinquer. Heureusement que l’Etat est intervenu. Cette décision profite aussi aux investisseurs institutionnels.  Elle va aussi dissuader ceux qui voulaient déjà créer leurs cryptomonnaies. Je vous ai dit qu’il existe plus de 16.000. Quelle est cette monnaie dont la zone de couverture est mondiale ? C’est extrêmement curieux. Vous achetez ça où ? C’est de la vraie fumée. Je connais plein de gens qui ont déchanté. Recyclons l’argent dans les matières physiques que nous connaissons. Les crypto-actifs pour moi ne sont pas encore des monnaies. Si vous êtes une monnaie, vous devez avoir une banque d’émission, une institution de régulation, une banque de règlement. On n’a rien de tel. L’alerte du gouverneur de la Beac et président de la Cobac est du pain béni pour les épargnants. Et une alerte pour les banquiers et responsables de microfinances qui oseraient prendre l’argent des épargnants pour des placements fictifs. L’argent à la banque n’appartient pas au banquier, mais aux épargnants.

Entretien avec Valgadine TONGA

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