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Dr. Gérard Eyoum : «Les données d’un pays sont du ressort de la sécurité nationale. Quand elles se retrouvent de façon incontrôlée à l’étranger, on est en danger»

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Spécialiste en crime électronique, expert judiciaire agréé auprès des Cours d’appel du Centre et du Littoral, Dr. Gérard Lewourien Eyoum est le PDG de la société Cyberix. Dans cette interview, ce Camerounais analyse l’impact de la cybercriminalité au Cameroun. Et attire l’attention sur l’urgence de la cyber-défense au Cameroun.

 

Les informations sur nous, notre vie, nos profils d’utilisateurs sont logés dans des serveurs à l’étranger. Parfois les mots de passe que nous utilisons pour accéder à ces applications. Un des rares Spécialiste en crime électronique, expert Dr. Gérard Lewourien Eyoum est le PDG de la société Cyberix
Dr. Gérard Lewourien Eyoum.

Quel est l’état de la cybercriminalité au Cameroun ?

Il y a de cela trois ans nous étions parmi les cinq pays les plus infectés en Afrique. Je pense en réalité que le niveau de la cybercriminalité au Cameroun est relativement élevé. En revanche  les instances gouvernementales travaillent sans relâche pour pouvoir empêcher la progression. Les différentes machines politiques et étatiques fonctionnent très bien. Mais je pense qu’il y a encore beaucoup de choses à faire dans ce domaine. Déjà il faut se mettre dans les normes internationales mais surtout développer une politique globale nationale de sécurité, parce que les différents acteurs aujourd’hui qui combattent la cybercriminalité évoluent de façon solitaire. Il y a des actions très isolées pourtant je pense que si on agit de façon globale, il est fort possible qu’un plan de cyber-défense efficace puisse être mis en place et beaucoup plus intéressant en matière de sécurité intérieure.

Pourquoi affirmez-vous que le cyberespace peut être un élément de déstabilisation et de destruction massive ?

Peu importe le nom qu’on donne à l’information, dans un autre secteur comme les secteurs stratégiques, ça s’appelle du renseignement. On sait bien que le renseignement est un outil de management et de pouvoir au plus haut niveau. Donc si aujourd’hui 80% des informations de notre pays sont contenues dans des cyberespaces et que nous ne les contrôlons pas, ça veut dire en réalité que nous ne contrôlons pas 80% des informations du pays. Ce qui est très dangereux. Il est important pour un pays de mettre en place des phénomènes de filtrage, afin de savoir ce qui doit sortir et ce qui doit entrer. Sinon  on devient très exposé à des actions de subversion et de déstabilisation. Aujourd’hui, combien de dégâts et de maux les réseaux sociaux ont créé dans les familles ? On voit tous les jours les ministres qui sont obligés de faire des démentis, alors que tout le monde ne lit pas ces démentis. Il est quand même urgent  de réagir et de contrôler ces facteurs. Aujourd’hui on est totalement impuissant devant les Fake news. Qu’est-ce que les autres ont fait ? Comment est-ce qu’ils l’ont fait ? Pourquoi nous ne le faisons pas ? C’est ça les différents challenges. C’est bien de courir vers la numérisation, de crier vers une génération androïde, mais si on ne contrôle pas les dangers d’exposition au prisme digital, la génération androïde peut aussi être la génération perdue. Les cyberespaces sont des espaces soumis à l’autorité, à l’intégrité d’un Etat. La Chine, la Russie, bien d’autres pays ont mis en place des politiques pour protéger leur espace. Nous avons par exemple vu à Dubaï comment l’arrivée de Whatsapp a attaqué l’économie en fragilisant la téléphonie. Ils ont mis en place des politiques qui empêchent d’appeler via Whatsapp lorsque vous êtes à Dubaï. Pourquoi est-ce que nous n’utilisons pas les technologies digitales, la découverte numérique ou le miracle du troisième âge à notre avantage pour résoudre nos propres problèmes ? On croyait que ce n’était pas possible pourtant le Rwanda l’a fait, donc nous aussi pouvons le faire.

Quel danger réel représentent les réseaux sociaux comme Whatsapp ?

Les serveurs de toutes ces applications sont logés à l’étranger. Les informations sur nous, notre vie, nos profils d’utilisateurs sont logés à l’étranger. Parfois les mots de passe que nous utilisons pour accéder à ces applications sont les mêmes que nous utilisons pour notre boite mail, pour notre compte bancaire. Demain, lorsque ces serveurs sont compris à l’étranger, la répercussion se rabat jusqu’ici. On a vu comment le virus petya a frappé à l’étranger et a sévi également au Cameroun. C’est la même chose lorsque nos entreprises hébergent les données à l’étranger. Les données d’un pays sont du ressort de la sécurité nationale. Quand ces informations se retrouvent de façon incontrôlée, non filtrée à l’étranger, on est en danger. Quand ces informations sont traitées et analysées, ce qu’il en ressort est appelé dans le jargon géostratégique le renseignement.

Quel est l’impact de la cybercriminalité, les réseaux sociaux sur le terrorisme au Cameroun ?

On devrait penser à contrôler le cyberespace au Cameroun, en faire une propriété camerounaise, ce qui n’est malheureusement pas encore le cas. Tant que notre cyberespace ne nous appartient pas, il peut être utilisé contre nous. Mais quand il nous appartient, il est exclusivement camerounais, et du ressort des autorités camerounaises en matière de management et de gestion de crise et même de prise de décision sécuritaire.

Comment faire donc pour avoir un cyberespace camerounais ?

On contacte des experts. Le Cameroun en a.

Pourquoi être-vous autant réservé quant à l’arrivée de la monnaie électronique au Cameroun ?

A mon avis, l’Etat devrait déjà penser à se pencher dessus et voir comment réglementer et contrôler très vite  ce phénomène, parce que en réalité, avec cette monnaie électronique ou cryptée, il y a jusqu’à présent plus de victimes que de satisfaits. Il est important pour notre pays de réfléchir pour voir comment régir et légiférer ce phénomène. Avec ces Bitcoin que nous avons ici, qui sont logés dans les serveurs à l’étranger, ce phénomène ne facilitera-t-il pas l’évasion des fonds camerounais vers l’étranger, même de façon inconsciente ? Le fait est qu’il y a une conversion de la monnaie physique en monnaie virtuelle qui est logée dans un serveur étranger. Par conséquent,  le Cameroun perd de l’argent d’une façon ou d’une autre. Il faudrait que des institutions telles que la Cobac, la Beac essayent de regarder parce que la cryptomonnaie est aujourd’hui un gros moyen d’évasion et de transfert des fonds de façon transparente. Et nous ne devons pas nous étonner que demain ça soit au cœur des arnaques et du financement du terrorisme. Je ne mettrais pas mon argent là dedans si ce n’est pas régi par une réglementation, parce que si je me fais arnaquer, quels sont les voies de recours que j’ai ? Est-ce qu’il existe même des experts agréés dans les différentes cours en matière de cryptomonnaie et de contentieux cryptofinancier ? Tout ça n’est pas encore fait. Il y a un gros vide juridique. Si je ne suis pas couvert par la loi, je ne vais nulle part.

Entretien avec Valgadine TONGA

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