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Chronique culturelle de NEW / Utilisation d’œuvres existantes : plagiat, interprétations enregistrée – sur quel pied danser ? (2ème partie)

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Que mon ami T. William fasse l’objet d’accusation de plagiat n’est pas sans rappeler que quelques temps auparavant, lui-même faisait l’objet de copie d’une de ses œuvres par un artiste peintre Camerounais qui lui est contemporain. Une mini affaire soulevée toujours sur Facebook, qui s’est estompée progressivement. Ce n’est pas non plus sans rappeler une autre affaire de plagiat, qui avait secoué l’univers des Beaux-Arts, notamment en France, avec en toile de fond, l’œuvre de Jean Michel Basquiat. Dans ce cas, il était bien évident que l’artiste plasticien Français Guillaume Verda, faisait un travail de copiste d’un certain nombre d’œuvres de Basquiat, sans prendre le soin de préciser leur paternité réelle. Ce qui relève sans équivoque du plagiat. Dans le cas qui nous interpelle présentement, les données sont totalement différentes.

Lire aussi :Chronique culturelle de NEW /L’utilisation d’œuvres existantes : plagiat, interprétations enregistrées…sur quel pied danser ? 

Dans un premier temps, on a affaire justement au cas typique de ce que l’on peut considérer comme une œuvre composite, qui consiste en la réalisation d’une œuvre dans laquelle on incorpore le tout ou partie d’une œuvre préexistante. L’œuvre de T. William fait partie de sa série baptisée : « Enfance volée », précisément celle où il reprend des œuvres de grands maîtres, en effectuant une transposition harmonieuse des éléments formels de son cru. À chaque fois il fait l’effort de créditer dans les publications qu’il en fait, les auteurs des œuvres préexistantes, comme dans le cas présent : « Le rêve des enfants est de s’épanouir, de briser les chaînes qui les tiennent  captifs, et de se sentir aussi libre comme les personnages de l’artiste pop, Keith Haring  #keithharingart de la série enfance volée. Toile débutée en 2018 achevée en 2020.  #artcontemporainafricain https://www.instagram.com/p/B_7-iw-heqi/?igshid=exd4iu6dki7  »

De la sorte, il ne s’approprie nullement la création d’autrui, bien que pour sa création propre, il s’en inspire et carrément l’incorpore. À ce sujet l’obligation légale qui lui incombe est de veiller à ne pas faire préjudice au droit d’auteur sur les œuvres préexistantes dont il s’inspire. Ainsi que le dispose alors la loi n° 2000/019 du 19 décembre 2000 régissant le droit d’auteur et les droits voisins du droit d’auteur au Cameroun, notamment dans l’article ci-après :

« 4. 1) L’œuvre s’entend aussi bien sous sa forme première que dérivée, ou composite.

2) Outre les œuvres citées à l’article 3 ci-dessus, sont notamment protégées comme œuvres composites, sans préjudice des droits d’auteur sur l’œuvre préexistante ».

Ce qui nous intéresse particulièrement c’est l’expression : « sans préjudice des droits d’auteur sur l’œuvre préexistante ». Cela suppose-t-il qu’il faille requérir l’autorisation de titulaire(s) de droit d’auteur sur ladite œuvre ? Au juste dans quel cadre cette autorisation expresse est-elle applicable ? La notion de l’autorisation n’est convoquée qu’en rapport avec l’exploitation d’une œuvre faite par un tiers autre que le(s) détenteur(s) de droit d’auteur, en l’occurrence à l’article 15 de la loi susmentionnée. Ce qui suppose qu’on doit se trouver dans la situation de l’exploitation d’une œuvre par représentation, reproduction, transformation, distribution, pour qu’il soit nécessaire de requérir l’autorisation écrite préalable du titulaire de droit. Bien sûr que la reproduction par exemple peut se faire par le procédé du dessin, comme le dispose l’article 17al.1. Sauf, qu’ici on n’a pas affaire au dessin bien que sous-jacent, mais à la peinture. Par ailleurs, ladite reproduction peut également se faire par gravure, qui s’applique au genre peinture, que dans l’article 3al.e, qu’avec le dessin ils bénéficient de la protection de la loi en qualité d’œuvres originales ; l’originalité s’étendant jusqu’à celle dérivée ou composite.

Lire aussi :Chronique culturelle de NEW : l’exposition d’objets d’art volés 

Ce qui laisse entendre qu’une œuvre qu’on crée soi-même et qui présente toutes les caractéristiques de l’originalité ne souffre d’aucune contestation. Que lorsque pour la créer on incorpore par quelque procédé de reproduction (à l’instar du dessin ou autre), ou par transformation (arrangement), le résultat obtenu, l’œuvre composite ou dérivée est tout aussi originale que celle préexistante. Par contre, si l’on se contente de faire une simple copie ou reproduction d’une partie ou de l’entièreté d’une œuvre originale, il s’agit d’exploitation qui ne fait appel à aucun processus créatif et donc les moyens affectés pour ce faire relèvent de la technique pure, et dans ce cas, on a l’obligation d’obtenir une autorisation de titulaire(s) de droit concerné(s). À contrario, le fait de ne pas faire préjudice au droit d’auteur inhérent à l’œuvre préexistante dans le cadre d’une œuvre composite ou dérivée, désigne le respect des attributs d’ordre moral. Notamment, l’évocation de la paternité reconnue à l’auteur de l’œuvre préexistante, dans toute publication ou déclaration que l’on fait de l’œuvre composite.

C’est exactement ce à quoi s’attelle à faire l’auteur T. William, par la mention de l’auteur de l’œuvre incorporée à la sienne. Puisqu’il ne s’agit pas d’une reproduction ou toute autre forme d’exploitation, il n’est pas tenu à l’obtention d’une autorisation pour accomplir son acte créatif. Il faut bien comprendre que la création originale qui couvre le droit d’auteur, ne repose pas sur le principe de la nouveauté, mais de la différence. Le législateur, en intégrant la notion de l’œuvre composite, a bien voulu tenir compte du fait qu’il est extrêmement difficile d’avoir une création totalement nouvelle, qui se fait ex-nihilo, sans s’inspirer d’autres œuvres qui la précèdent, afin de ne pas annihiler l’effort créatif par des contraintes procédurales difficiles à tenir. La charge juridique incombant dans ce cas à l’auteur de l’œuvre composite de ne faire préjudice au droit inhérent à l’œuvre préexistante, étant notamment le soin du crédit fait à son auteur. Il ne faut pas nécessairement dire « tribute à X », qu’on peut utiliser tout élément de langage qui rende compte de ce fait.

En outre, il ne peut être approprié de parler d’une citation dans le cas d’espèce, car cette notion relève des usages de la littérature écrite ou orale, qui ne sont pas transposable à l’univers des arts visuels. D’autant plus que dans le cas d’espèce, l’objet et le but de l’incorporation est d’illustrer, l’œuvre de Keith Haring apparaissant comme illustration vectorielle de l’état de gaité et de liberté en opposition avec la condition précaire de l’enfant au premier plan, en perte d’innocence parce qu’enchainé à des tâches quotidiennes qui ne relèvent pas de son âge. Au demeurant l’illustration fait partie des usages, autant que des disciplines artistiques dans les Beaux-Arts et même au-delà.

En définitive, T. William n’a violé aucune disposition légale par l’incorporation Illustrative des éléments formels de l’œuvre de Keith Haring dans la sienne. En revanche, par respect des droits sur l’œuvre préexistante, il en a crédité l’auteur, dans la publication qu’il fait de l’œuvre composite qui s’en inspire. Il n’a besoin ni de détruire son œuvre, ni qu’elle soit retirée de toute exposition à laquelle elle a le loisir de participer. Elle est en soi un vibrant hommage à la créativité humaine qui s’enrichit des apports artistiques marquants qui jalonnent le cours de l’histoire de l’Art.

Par Elie Walter NGAMBI, aka NEW 

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