Attribution d’ awards aux personnalités : Nouvelle forme de mendicité sociale, de corruption, de clientélisme, d’escroquerie à grande échelle ou enjeu de positionnement socio-politique au Cameroun?

Les cérémonies d’attribution d’ awards à des personnalités publiques organisées au Cameroun sont entachées de curiosités et d’incongruités. Tout part, en général, des catégories répertoriées par les organisateurs pour aboutir à l’identification des nominés, dont la technique méthodologique de sélection est inconnue du grand public. L’on se souvient qu’à la fin de chaque année ou en tout début de la nouvelle, des organes médiatiques organisent, chacun dans son giron, une cérémonie de récompense des membres du gouvernement, des artistes-musiciens locaux et des leaders et acteurs socio-politiques. L’expérience de l’organisation desdits événements, ces dernières années, a permis de débusquer des lacunes et de s’interroger sur la stature épistémique et méthodologique du choix des nominés et, par conséquent, des promus.
Les élucubrations de cette entité de copains
A une certaine époque, une station de radio à capitaux privés avait décidé, dans une tribune de débat, de primer les meilleurs membres du gouvernement. Seulement, la démarche retenue par le promoteur, devenu pasteur, consistait à rassembler une grappe de journalistes, dont le rôle consistait à attribuer la note sur 20 à chaque ministre de la République. Il y était entremêlé, entre autres, des serviteurs de la Respublica corrompus et corrupteurs, prévaricateurs, bref des membres du gouvernement indélicats, dont certains croupissent, il y a plusieurs années, dans les geôles des prisons de Yaoundé et de Douala. Sans décrire, in extenso, les coulisses, les intrigues, les railleries et la notation incongrue des Hommes de médias qui avaient été alors choisis, il est loisible de se questionner sur le choix d’une telle démarche. En effet, après avoir, à cette période-là, suivi les élucubrations de cette entité de copains, il est apparu que la notation des membres du gouvernement n’était guère faite en fonction d’une critériologie scientifique déterminée, mais elle était plutôt fondée sur des référentiels affectif et subjectif agglutinés autour des jugements de valeur impressionniste et normatif. D’aucuns basculaient, d’ailleurs, dans un dogmatisme de mauvais aloi, prêtant le flanc à la prédiction des recommandations pompeuses et creuses. Lorsque certains acteurs de médias-membres du jury affirmaient avoir eu des accointances avec certains ministres, car les ayant reçu parfois dans leurs salons feutrés, cet indicateur, a priori, anodin, mais a posteriori, significatif a la propension de biaiser l’appréciation et de faire, par corollaire, naviguer la notation dans l’idéologie.
Prisonnière des carcans
Il en est de même des cérémonies d’attribution d’ awards aux artistes-musiciens locaux, aux Hommes de médias et aux personnalités politiques organisées par des cabinets de communication, des entreprises audiovisuelles et certaines corporations de la société civile. La première curiosité est liée à la présélection des nominés, dont la critériologie de choix n’est pas connue de tous. Les mécanismes de diffusion de ces nominés sont si pompeux que l’on s’interroge sur la trajectoire de certains peu visibles dans l’espace public. La deuxième curiosité a trait à la catégorisation polémiste et parfois lacunaire des personnalités et structures données dans certains paliers. Lorsqu’une structure embryonnaire sur l’échiquier public s’emploie à primer un meilleur organe médiatique dans la catégorie du management, comment peut-on, sur la même balance évaluative, comparer deux chapelles médiatiques à capitaux privés ayant, au moins, 15 ans d’existence et de rayonnement médiatique à une entreprise née de nouveau dans l’agora? Comment peut-on, dans la même veine, classer les meilleurs Hommes politiques de l’année 2017 et insérer, curieusement, une femme politique de surcroît première figure féminine à la Présidentielle 2011 dans une catégorie liée aux affaires sociales? Visiblement, cette structure attributrice des awards est restée prisonnière des carcans de la perception phallocratique et traditionnelle des femmes confinées dans la réalisation des activités éminemment socio-éducatives. Pourtant, cette femme politique intervient, bel et bien, dans des émissions de débat politique sous la bannière du parti politique, dont elle tient toujours les rênes. Comment peut-on mettre en concurrence des programmes de débat interactif quotidiens avec des émissions de débat hebdomadaire qui ne ravissent la vedette que le temps d’un samedi ou d’un dimanche dans le kaléidoscope médiatique local. Rationnellement, il est idoine de comparer les émissions de débat interactif quotidien des radios urbaines dans un palier et ranger, dans une autre section, la compétition des programmes de débat politique hebdomadaire. Les questions mentionnées supra, dont la nomenclatura n’est pas exhaustive, alimentent bien de curiosités et d’incongruités des cérémonies de récompense, dont les résultats, in fine, sont foncièrement contestables et attaquables nonobstant la qualité intrinsèque de certains membres du jury.
Serge Aimé BIKOI, Journaliste et Sociologue du développement.