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La coopération Sud-Sud à l’heure des grandes mutations sur le continent – réalité au Cameroun

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Chronique culturelle de NEW (Elie Walter NGAMBI)

« La culture est la carte d’identité d’un peuple, et que mon identité c’est moi et seulement moi. Il est donc difficilement compréhensible qu’on veuille développer la nôtre dans le couloir des subventions étrangères. Nous sommes restés très longtemps dans ce lit très douillet dans une chambre en contre plaquet aggloméré. Si nous continuions dans cette logique, il sera très difficile pour nous de pouvoir envisager de quitter cette chambre pour un bout, de peur que le premier malfrat nous pique notre lit douillet.

Il nous faut absolument, je dis absolument assumer notre identité pour lui donner la valeur qu’elle mérite. Si nous insistons à vouloir manger du camembert alors il nous viendra de là-bas, mais  souvenons-nous et pensons à notre bon ndolè aux écrevisses, pensons à notre bon poisson à la braise…qui est juste là, pas là-bas. Et là-bas est loin, très loin de là. » Tel est le commentaire d’une pertinence absolue de MBOUNJA ÉPÉ’A SAMÈ (Artiste plasticien professionnel émérite, enseignant d’université en arts plastiques et histoire de l’art, historien sur le point de commettre un ouvrage de référence sur la culture sawa), dans un échange dans un forum WhatsApp, sur le fait d’actualité relatif aux dernières prises de position du Quay d’Orsay concernant des artistes honnis du Mali, Burkina Faso et Niger.

Puisqu’il s’agit de l’identité des peuples africains, socles sociaux des nations de ce vieux continent, il est très important de l’assumer, en s’interdisant désormais de s’inféoder à des puissances étrangères occidentales ou autres, mais surtout en relevant le défi de la coopération en matière culturelle entre les pays africains et d’autres qui se reconnaissent comme appartenant à ce qu’on nomme aujourd’hui : Sud global. À l’heure où de grandes mutations sociopolitiques, économiques et géopolitiques s’opèrent sur le continent africain, il convient de fédérer les énergies multiples vers un mieux-être des acteurs culturels, à l’aune d’une coopération gagnant-gagnant entre ces différents Etats. Comment cela peut-il être possible ? D’abord, voyons de quoi il en retourne.

Coopération Sud-Sud ?

Le Bureau des Nations Unies pour la coopération Sud-Sud (UNOSSC) souligne à ce sujet : « La coopération Sud-Sud fait référence à un cadre de collaboration politique, économique, social, culturel, environnemental et technique entre les pays. Impliquant deux ou plusieurs pays en développement, cet effort peut se dérouler sur une base bilatérale, régionale, intrarégionale ou interrégionale. Grâce à la collaboration Sud-Sud, les pays en développement partagent leurs connaissances, leurs compétences, leur expertise et leurs ressources pour atteindre leurs objectifs de développement grâce à des efforts concertés ».

Il en ressort que la coopération Sud-Sud est celle qu’effectuent les pays en développement. Certes, les pays africains présentent des disparités économiques notables ; certains étant pratiquement au bas de l’échelle de ceux classés parmi les plus pauvres, tandis que d’autres sont à revenus intermédiaires. En gros, ils constituent avec ceux de l’Amérique latine, ou nombre de ceux d’Asie : le Sud global. Il va s’en dire que, la coopération de ces pays avec l’Occident (désignés globalement comme ceux du Nord ou encore l’Occident collectif) s’est faite jusqu’ici avec plus d’entrain. Bien-sûr avec des fortunes diverses, nettement plus avantageuses pour ces derniers. En retour, pour justifier l’incurie d’une collaboration fructueuse dans ce seul sens, ces pays du Nord ont entretenu un narratif totalement débilitant autour du concept fumeux de l’aide au développement à l’adresse des pays du Sud, notamment ceux Africains.

Même si on a de la peine à le croire, pour maintenir un rapport de subordination de nombreux pays du Sud global vis-à-vis d’eux, ils ont multiplié des leviers contraignants en tout genre, pour contrôler, voire empêcher la coopération entre lesdits pays. Donc l’un des plus notables s’opère dans le secteur culturel, avec la prise en main à travers des institutions pour le moins parasitaires de pans entiers de ce secteur, dans nombre de pays africains. Qu’il faille impérieusement changer de paradigme, à l’aune des mutations historiques qui émaillent ce début du 21ème siècle. Les pays du Sud, en l’occurrence ceux africains se doivent plus que jamais de construire une « collaboration politique, économique, social, culturel, environnemental et technique » entre eux, leur permettant de mieux assurer leur développement et partant, s’affranchir de la tutelle occidentale, qui n’a servi qu’à les maintenir la tête sous l’eau du sous-développement.

Quels instruments sont nécessaires ?

À cet effet, les pays africains doivent systématiquement profiter de la mise en place de la Zone de Libre-échange Continentale Africaine (ZLECAF) pour asseoir cette collaboration tant souhaitée, principalement en matière culturelle. Les biens, services et acteurs culturels doivent circuler de part en part du continent, bénéficiant de dispositions de facilitation, d’accompagnement institutionnelles et de financiarisation par des partenaires multiformes, notamment ceux du secteur privé à capitaux locaux. La suppression de visas et de droit de douane inscrit à l’horizon sa concrétisation devrait prioritairement être applicable à ce secteur, facilitant ainsi la mobilité et le déploiement efficient des ICC. De la sorte, ces instruments économiques majeurs pourront valablement assumer leur apport au développement du continent.

Au demeurant, il faut relever le défi cornélien que représente la financiarisation des projets et autres initiatives intranationaux et internationaux impliquant les pays du Sud. Pour se faire s’interdire la paresse imaginative de recourir aux aides avilissantes de l’Occident. Pour des pays africains jusqu’ici tributaires volontaires ou forcés de cette source de financement de leur culture, ils peuvent davantage aller voir du côté des BRICS. Tant mieux que l’élargissement ce bloc-Etat s’opère aussi sur le continent, à l’instar de l’Égypte et de l’Éthiopie. Avec lui, on peut envisager de solliciter le ruissellement de capitaux mobilisables à travers la Nouvelle banque des BRICS. Mais déjà, se servir des instruments financiers de grandes envergures, telles que la Banque Africaine de Développement (BAD), de manière à orienter ses investissements vers des projets émergents en rapport avec la culture. Ce qui a été possible entre le Cameroun et le Nigeria, à travers le projet de pont sur le Cross River, passerelle entre les deux pays limitrophes sous financement de la BAD démontre à l’évidence que cela est possible avec des projets et activités culturelles à résonnance internationale, régionale et même continentale.

Par-dessus tout, il est indispensable que les Etats du Sud global et singulièrement ceux d’Afrique comprennent la nécessité de prendre le train en marche du multipolarisme géopolitique et géoéconomique qui se structure autour des BRICS et qui s’inscrit inexorablement dans l’affirmation des identités culturelles comme vecteur essentiel de souveraineté de chaque nation. Si l’on doit se refuser désormais à brader les souverainetés nationales, on se doit surtout d’utiliser le socle culturel national pour la projeter à l’échelle globale et se définir une place respectable dans le concert des nations. C’est asseoir un softpower reluquant propre à projeter nos Etats vers l’émergence tant scandé. Se parer des atouts de solidarité si chère à la civilisation légendaire africaine peut alors servir à faciliter la coopération tous azimuts entre un pays comme le Cameroun et tous les autres faisant partie du Sud global dans la perspective de développement intégré et durable.

La culture comme instrument majeur de Coopération Sud-sud

En somme, lorsque l’on sait que la culture ne connait pas de frontière géographique, l’anapiano, l’afrobeats, le Makossa, les productions de Nollywood ou du Mboawood autant que des œuvres d’art contemporain des grands talents africains les traversant allègrement, on peut aisément surfer sur cette vague, pour assurer la coopération Sud-Sud. De la sorte, à la suite des mesures voulues punitives à l’encontre des artistes du Mali, du Burkina Faso et du Niger, interdisant leur enrôlement dans tout programme bénéficiant de financement colonial français, il faut y voir une opportunité pour les pays africains dans leur ensemble, de s’affranchir d’une tutelle aussi nocive. En contrepartie, c’est une opportunité redoutable de déployer des trésors d’ingéniosité, de ressources financières, dans la perspective de coopération entre ces pays et les autres du Sud global. En la matière, on ne peut qu’être d’accord avec HOUAJIE NKOUONKAM, conseil en ingénierie culturelle, qui affirme avec délectation : « Ça serait une terrible erreur de la part des acteurs culturels burkinabè, maliens et nigériens de prendre cette mesure libératoire pour une sanction. C’est même une opportunité inouïe pour les pouvoirs publics des pays concernés de redéfinir leurs politiques publiques en matière d’actions culturelles, que ce soit sur le plan national ou bien sur le plan de leurs relations bilatérales ou multilatérales avec d’autres pays du Nord et surtout du Sud ».

En clair, il faut sortir de la mentalité d’assisté servile, pour construire celle de conquérant de nos propres possibilités, avec nos moyens propres ou ceux de ceux qui sont inscrits à la même enseigne que nous. Alors ensemble les pays africains et les autres du Sud global tissent la toile commune de leur développement économique et social.

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