Des citoyens de ce pays, le nôtre, sont traités plus bas que terre. Comme des pestiférés. Des parias. Chassés de leurs terres et de leurs habitations. Pour d’obscures raisons d’utilité publique qui dissimulent des intérêts privés. Le scandale des scandales. Une expropriation à grande échelle. Justice sociale ou braconnage?
Déguerpissez!
Et si on vous retournait le compliment? Le Cameroun vient de fêter le cinquantenaire de l’unité nationale. Or la situation des sans domiciliés fixes, appelés les déguerpis traduit mieux que de longs discours, une faillite. Question simple. Qu’est-ce qui va bien dans ce pays que nous chérissons? Ce pays qui est notre patrimoine commun? Même le cinquantenaire de notre unité nationale est entaché de menaces sourdes. Des crises à tous les étages. Crise démocratique et menaces sécuritaires.
Les défis sont lourds, pressants et oppressants. Notre pays est pris en étau. Comme dans un goulot d’étranglement. La question de la justice sociale doit être au cœur des préoccupations des dirigeants. Est-ce le cas? Sur les réseaux sociaux, les images sont abondamment commentées. Elles interrogent. Gravement.
Des femmes éplorées. Des familles entières délogées de leurs habitations.
Des maisons en lambeaux, broyées par des engins de chantier sous le regard des escadrons anti-émeutes. Les autorités fabriquent des exilés de l’intérieur. Avec ou sans titre foncier. Au nom de quels intérêts supérieurs? Des évacuations faites manu-militari. Des expropriations forcées. Injustice sociale.
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Dans la presse une expression est déclinée à tous les temps. Violente, brutale, insultante et méprisante : Déguerpissez! Il s’agit de jeter à la rue ceux qui crient à l’injustice. Peu d’entre eux ont été indemnisés. Les critères de l’expropriation restent flous. Comme souvent. A qui profite le crime? Des documents accusatoires et contradictoires circulent.
Le scandale est d’ampleur. Et l’indignation d’envergure. Les limites de la décence ont été franchies. Le mal est fait. Il est profond et irréparable. Notre société a atteint un point de non-retour.
Les Services de l’Etat tardent à faire la lumière, toute la lumière sur ce nouveau scandale. Ce déficit de clarification donne libre cours à toutes les interprétations. A toutes les hypothèses. Les métastases de l’injustice et de la division se diffusent dans le corps social. Inéluctablement. Irrémédiablement. Irréversiblement.
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Déguerpissez!
A l’occasion du cinquantenaire de l’unité nationale, les bien-pensants ont rappelé en chœur, la société unie et indivisible. Allez-donc le dire à ceux qui ont des fins de mois difficiles. A ceux qui dès le quinze du mois, ne savent plus à quel saint se vouer. L’injustice sociale est une plaie putride et incurable. Le corps social est miné, rongé de l’intérieur. Quand on a tout perdu, que peut-on encore craindre?
Ne désespérez pas les Camerounais.
Les lanceurs d’alerte tirent la sonnette d’alarme. En vain. Le pays va mal. Les frustrations s’accumulent. Le climat social devient pesant, anxiogène et irrespirable. On attend des signaux qui ne viennent pas. Certains commentateurs parmi les plus serviles préfèrent la surenchère et la flagornerie de bas étage. Aucune distance critique. C’est l’estomac qui parle. Pendant ce temps, les crises se font toujours plus aiguës. Elles sont sécuritaires avec leur cortège de victimes et de déplacés. De destructions et de ruines. Les crises sont sociales et économiques. Des familles appauvries. De plus en plus. Des déplacés involontaires. La désespérance sociale est une bombe à retardement.
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Le risque? La fragmentation. Notre pays attise des foyers de tension. Faites attention au magma des colères latentes. Elles peuvent surgir sans prévenir. Comme une éruption volcanique. Furieuse et incontrôlable. Comme une larve incandescente et en furie. Nous assistons à une fuite en avant de la mal gouvernance. Les problèmes aigus ne sont pas traités à la racine. Et le mal se diffuse. Nos dirigeants donnent le sentiment de naviguer à vue. Sans boussole. A tâtons. Ils ne réagissent que dans la précipitation, dans l’affolement. Le dos au mur. Nullement à bon escient.
A force de mettre la poussière sous le tapis, à force de pratiquer la politique de l’autruche, méfions-nous des retours de flammes. Quel est notre modèle de société? Quel est notre idéal humain cinquante ans après la proclamation de notre unité?
Nos désaccords et nos points de crispation augmentent. Chaque jour davantage. Une crise chasse l’autre. Et elles s’accumulent. Le tsunami foncier Dikolo-Bali pourrait être encore plus dévastateur pour les apprentis sorciers. Pour désamorcer cette énième crise et cette bombe à retardement, le gouvernement de la région du Littoral a annoncé l’arrêt du chantier et la constitution d’une commission dédiée.
Soit. Le temps est suspendu mais le mal est fait. Comme une gangrène dans le corps social. Comment réparer des décisions inconséquentes et traumatisantes? Nous sommes au pied du mur. L’absence de résultats tangibles est inenvisageable. Ne jouez pas la montre. Renoncez à enterrer ce dossier même en première classe. Il y a urgence aux urgences.
Cyrille Sam MBAKA,
Président de l’AFP (L’Alliance des Forces Progressistes)