Pour les protéger contre cette pratique ignoble, son épouse a pris la fuite avec lesdits enfants vers le Tchad. En guise de représailles, son mari s’est attaqué à la sœur de sa femme en lui tranchant une oreille.
Pour briser le silence sur cette affaire qui a failli lui couter la vie, la victime a décidé de tout dévoiler à la presse. « Ma petite sœur a quitté son époux parce qu’il avait un projet machiavélique. Elle est partie du Cameroun avec ses deux filles parce que son mari voulait les exciser. Ayant constaté sa fuite, il m’a contacté et ma famille, notamment mon père Mohamadou Djelani, pour savoir où se trouvait son épouse et si nous avions de ses nouvelles. A mainte reprises, je lui ai dit que je n’en savait rien, jusqu’au jour où qu’il a appris que c’est moi qui aurait financé son voyage avec ses deux filles pour le Tchad », relate Samira Aicha Djelani qui n’est pas encore sorti de ce tourment.
En réalité, c’est depuis 2021 que le nommé Mohamadou Hassimi, père de famille vivant à Bertoua cherche son épouse Hawaou Djelani et ses deux filles, Aicha Nadia Hassimi et Aaliya Rabia Hassimi, âgées respectivement de 9 et 5 ans. Très remonté par ce qu’il a manifestement considéré comme un « double jeu » de sa belle-sœur, Mohamadou Hassimi va débarquer chez elle le 22 octobre 2023, pour lui faire payer le prix de sa « duplicité ». « Devant mes enfants, il s’en est pris à moi en disant que c’est moi qui ai organisé la fuite de ma petite sœur. En représailles, il m’a tranché une oreille », raconte la victime.
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Après ce forfait, son bourreau a été interpellé, puis remis en liberté malgré la plainte qui avait été déposée par la victime. Dans son récit des faits, Samira Aicha Djelani indique que « Mohamadou Hassimi est un véritable danger pour ma petite sœur et ses enfants. Avant de prendre la fuite pour l’exil, elle avait également déposé une plainte contre lui parce qu’il voulait exciser ses enfants. Malheureusement, la justice n’a pas tenu compte de cela et elle se trouvait en danger dans sa maison ».
Priver les filles du plaisir sexuel
Malgré l’arsenal juridique mis en place pour éradiquer ce fléau, les mutilations génitales féminines persistent dans certaines communautés de cette région. Selon Jules Eyoum, un défenseur des Droits de l’Homme, « elles se pratiquent mais de manière silencieuse ». Ces pratiques ajoute-t-il, « sont souvent associées à un rite de pureté et de passage à l’âge adulte ». Pour traquer les auteurs, il faut que ce soit un membre de la famille qui dénonce comme c’est le cas de Samira Aicha Djelani. Selon notre interlocuteur, « l’excision dont il s’agit est une ablation partielle ou totale des organes génitaux féminins externes par une exciseuse traditionnelle avec un couteau ou une lame de rasoir avec ou sans anesthésie. Avec toutes les conséquences que cela comporte, cette pratique vise à priver les jeunes filles du plaisir sexuel ».
D’après la Loi camerounaise 2016/007 du 12 juillet 2016 portant Code pénal, dans ses articles 277 et 277-1, est puni d’un emprisonnement de dix (10) à vingt (20) ans, celui qui procède à la mutilation de l’organe génital d’une personne, quel que soit le procédé. Bien plus, « la peine est l’emprisonnement à vie : si l’auteur se livre habituellement à cette pratique ou si il le fait à des fins commerciales ; si la mort de la victime en résulte ». La juridiction peut en outre prononcer les déchéances prévues aux articles 19 et 30 du présent Code.
Ange-Gabriel OLINGA BENG à Bertoua