Nous avons ouvert une série sur la police municipale, en évoquant le cadre légal qui la régit. En rappel, une loi autorise la création de ce corps par les maires après avis des conseillers municipaux à travers une délibération. Les missions qui leur sont assignées sont aussi nobles que nombreuses. Mais aucune disposition ne les autorise à se retrouver sur la voie publique à interpeller les véhicules.
Leur présence est donc la plus part de temps, sinon toujours illégale sur la chaussée si l’on veut y voir de près. Sur le plan règlementaire, aucun civil n’a le droit de procéder au contrôle sur la voie publique. Cette prérogative revient aux agents de maintien de la force de l’ordre, que sont la police et la gendarmerie. Même en cas de contrôle mixte comme cela a souvent été le cas au Cameroun, les militaires présents n’osaient pas interpeller, leur présence étant juste pour donner plus d’autorité à la patrouille.
En plus, si par extraordinaire, un corps autre que celui de la force du maintien de l’ordre venait à devoir effectuer un contrôle sur la voie publique, comme le service des impôts pour le contrôle de la vignette automobile, il devrait se faire accompagner par des éléments de la force de maintien de l’ordre. C’est un agent des Forces de l’ordre qui arrête les véhicules ou engins, vérifie l’objet à contrôler. L’agent civil du service concerné n’intervenant que pour vendre la pièce manquante ou régler une incompréhension. Plus est, quel que soit le type de contrôle sur la voie publique, la patrouille doit être conduite par un élément des forces de maintien de l’ordre ayant au moins le grade d’officier de police judiciaire, c’est-à-dire apte à dresser un procès-verbal recevable devant la justice ou opposable à un tiers. La patrouille doit aussi être porteuse d’un ordre de mission indiquant la date du contrôle, le lieu précis, la durée du contrôle, la pièce recherchée, le nombre d’éléments que comporte la patrouille.
Pour ce qui est de nos policiers municipaux, les maires justifient souvent leur présence sur la voie publique par le contrôle de l’impôt libératoire ou de la taxe de stationnement. Soit, mais nous tous savons que cette présence ne respecte rien des indications citées plus haut. Parfois, quand un agent de la Force du maintien de l’ordre les accompagne, il est le plus souvent assis en retrait, tandis que ces policiers de fortune, avec des herses et des sifflets, arrêtent et contrôlent les automobilistes et extorquent aux moins vigilants des billets de banques. Ils ont pour signe distinctif, le port des chasubles frappées des armoiries de la Communauté Urbaine ou d’une mairie d’arrondissement, avec, au dos, l’inscription « Police Municipale ». L’homme politique Albert Nzongang les décrit comme « particulièrement brutaux, arrogants et hargneux, comme des fumeurs de chanvre indien ! » Ce dernier a d’ailleurs saisi par lettre le gouverneur de la région du Littoral et le Procureur de la République depuis le 13 septembre 2012, ceci, afin de prévenir tout désordre pouvant résulter du choc entre les usagers et des bandes d’individus opérant sur la voie publique. Sans que cela ne change grand-chose. Au contraire, au fil des années, leur présence est plus que régulière, et ironiquement, ils poussent le vice aussi loin en exploitant le mauvais état des routes, quand ils choisissent de ne se placer que sur des endroits de la chaussée où il y a des nids de poules, disent-ils pour empêcher les taxis de fuir leur interpellation.
Profitant aussi de l’ignorance des usagers, ils vont au-delà de l’impôt libératoire et de la taxe de stationnement, pour demander permis de conduire, roue de secours, rétroviseurs, bref tout ce qui peut embarrasser l’automobiliste et l’obliger à sortir de l’argent. Mais le citoyen doit savoir que quand il est interpellé sur la voie publique, il a aussi le droit de demander à celui qui l’interpelle de se présenter et de présenter l’ordre de mission qui justifie la présence de cette patrouille sur les lieux. En procédant ainsi cela permettrait de repousser ces abus qui sont sur nos voies publiques, et même de dissuader des imposteurs qui parfois arborent des tenues volées pour s’adonner à ces pratiques sur nos routes, alors qu’ils n’appartiennent à aucune institution.
Roland TSAPI