Les travaux du 7ème Dialogue politique de la Commission de l’Union africaine (Cua)-Réseau des institutions nationales africaines des droits de l’Homme (Rinadh) tablent essentiellement sur la justice réparatrice pour les Africains et Afro-descendants.
En janvier 2023, le président français Emmanuel Macron affirmait en prélude à une rencontre avec le président Algérien que la France n’a « pas à demander pardon à l’Algérie pour la colonisation. C’est, bien au contraire, soutenir que dedans il y a de l’inqualifiable, de l’incompris, de l’indécidable peut-être, de l’impardonnable». Si ce dernier martèle que les atrocités inhumaines infligées au peuple Noir pendant ce que l’occident avait baptisé la traite négrière n’a rien d’ ‘‘impardonnable’’, l’Afrique se lève aujourd’hui, pour frapper du poing sur la table. Et qui de mieux que les plénipotentiaires des droits de l’Homme pour mener cette revendication ?
Du 7 au 9 mai 2025, Commission de l’Union africaine (Cua)-Réseau des institutions nationales africaines des droits de l’Homme (Rinadh) s’est réunie à Addis-Abeba en Ethiopie, à la faveur du 7ème Dialogue politique Cua-Rinadh. Fil d’Ariane des travaux : « Justice pour les Africains et les personnes d’ascendance africaine par le biais des réparations : le rôle des INDH et des autres acteurs des Droits de l’Homme ».
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Dans l’allocution très attendue du Vice-président du Rinadh, le Camerounais Pr. James Mouangue Kobila ne s’est pas embarrassé de gangs : « La réparation des crimes historiques ne relève ni de la charité ni d’un apaisement trompeur de la conscience. Comme rappelé plus haut, elle s’enracine dans les principes de justice, de souveraineté, d’humanité et d’équité. Des siècles durant, l’Afrique et ses peuples ont subi les affres de
l’exploitation coloniale, de l’esclavage, de l’apartheid et de la domination raciale. La prospérité de nombreuses nations s’est ainsi bâtie sur le pillage des ressources africaines et sur la négation de la dignité des peuples africains ».
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Le Vice-président du Rinadh, par ailleurs président de la Commission des droits de l’Homme du Cameroun (Cdhc), a ainsi tempêté à l’attention de tous que « cette rencontre vise à éclairer l’élaboration d’une recommandation générale sur les réparations pour les préjudices historiques et actuels de l’esclavage – dit ‘‘de biens meubles’’ –affectant les personnes d’ascendance africaine. Ce thème nous engage à agir avec fidélité à la vérité historique, avec le courage moral et la détermination, par des actions concrètes. Pendant des décennies, ce sujet a tantôt été quelque peu oublié, tantôt relégué au second plan. Certains l’avaient même considéré comme périmé. Néanmoins, l’UA a soutenu plusieurs initiatives importantes en ce sens, allant des efforts visant à obtenir la restitution des objets culturels pillés à la promotion de revendications formelles de réparations à l’échelle mondiale. »
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L’Allemagne a restitué le 30 mars 2024 huit artefacts volés il y a plus de cent ans au peuple Lebialem de la Région du Sud-Ouest. Le Royaume-Uni a restitué, en avril 2024, 32 artefacts en or et en argent pillés au Ghana il y a plus de 150 ans. La France a restitué au Bénin, en novembre 2021, 26 œuvres d’art accaparées par les troupes coloniales en 1892. Afin d’obtenir réparation pour toutes les affres subies, le Professeur James Mouangue Kobila ponctue : « Les Institutions nationales des Droits de l’homme ont un rôle central à jouer à cet effet, et elles doivent pleinement assumer ce défi, y compris en documentant les crimes historiques au niveau national ; en offrant une expertise juridique indépendante dans les négociations internationales ; en contribuant à sensibiliser les jeunes générations et à institutionnaliser la mémoire. » Il est tout de même impératif pour les différents gouvernements de « faire preuve d’une volonté politique encore plus forte et le rôle de coordination des Communautés économiques régionales et des organes de l’Union africaine devrait être concrétisé par de nouveaux mandats explicites ». Le forum de dialogue politique Cua-Rinadh a été créé en 2017.
Valgadine TONGA