L’année scolaire 2018/2019 a commencé en septembre dernier avec des innovations sur le mode de paiement des contributions exigibles, et des frais d’examens officiels dans les établissements secondaires publiques. La ministre Nalova Lyonga avait en effet signé deux notes dans ce sens. La circulaire numéro 1302/18 du 26 juillet 2018 relative à l’ouverture des comptes trésor, et le communiqué numéro 71/18 du 28 août 2018 relatif au paiement électronique des frais de scolarités auprès des opérateurs désignés. Les chefs d’établissement se sont pliés à ces directives, en reversant auprès des opérateurs désignés les sommes perçues en marge des instructions, et en indiquant aux parents le chemin à suivre pour payer les frais exigibles des enfants.
La mesure, quoiqu’ obligeant les parents d’élèves à payer des frais des transactions, avait été relativement bien accueillie par ces derniers, car désormais cela leur évitait l’obligation de payer au préalable d’exorbitantes sommes en guise de frais d’Association des parents d’élèves et des enseignants. A ce jour toutes les contributions exigibles ont été payées, mais cet argent supposé permettre aux établissements de fonctionner au quotidien n’est jamais revenu aux chefs d’établissements pour certains, ou seulement une infime partie pour les plus chanceux.
Le piège du labyrinthe administratif
Pourtant, par communiqué radio numéro 95/18 du 13 décembre 2018, Nalova Lyonga informait la communauté éducative que les contributions exigibles et les frais d’examens officiels collectés par les opérateurs partenaires, étaient disponibles dans tous les postes comptables de la République depuis le 12 décembre 2018. Elle invitait ainsi les délégués régionaux et départementaux de son ministère, ainsi que les chefs d’établissements à se rapprocher de leurs postes comptables respectifs afin de rentrer en possession desdits fonds. Malgré cette assurance du ministre, certains chefs d’Etablissement restent catégoriques : à ce jour ils n’ont rien reçu, et ce n’est pas faute d’avoir cherché à rentrer en possession de cet argent. Les sommes versées aux opérateurs partenaires aurait pourtant été bel et bien reversées dans un compte au Trésor public.
Les trésoriers payeurs généraux sont supposés à leur tour avoir reversé cet argent dans les perceptions, qui devaient les redistribuer aux chefs d’Etablissement sur la base d’un listing fourni par les services du ministère. Mais le constat est que jusqu’ici, l’argent des élèves est noyé dans le labyrinthe de l’administration, victime des goulots d’étranglement, des lourdeurs et des procédures interminables. Dans la région du Littoral par exemple, certains établissements n’auraient à ce jour perçu un seul kopek dans les départements du Moungo et de la Sanaga Maritime. Mais aucun des chefs d’établissement n’ose en parler ouvertement, tétanisés par le système et soucieux de la protection de leurs carrières. En silence ils souffrent, et laissent échapper quelques confidences en surveillant bien leurs arrières.
Coup dur pour les établissements scolaires publics
D’après ces confidences, il y a un dysfonctionnement criard dans le processus de retraits des fonds. Ici on évoque comme l’une des principales difficultés, le désordre artistique qui s’est opéré par rapport aux codes attribués aux établissements, ce qui a entrainé de l’amalgame tant chez les chefs d’établissements que chez les opérateurs eux-mêmes. En plus, quand bien même cet argent sera finalement disponible dans les postes comptables, les chefs d’établissements redoutent le chantage des percepteurs, eu égard à la mentalité corruptrice installée dans les services publics, où de l’argent est rarement payé sans que le bénéficiaire ne laisse des plumes.
Si à ce jour ces fonds généralement disponibles dès le mois de septembre ne sont pas arrivés, il est évident que cela cause un handicap sérieux dans la chaine globale du fonctionnement des établissements. Cette situation porte également un coup sérieux à la qualité même de l’éducation, au moment où les discours vont dans le sens de l’amélioration. Tout se passe comme si cet argent était un cadeau fait aux chefs d’établissements. 16 rubriques au total sont concernées par les contributions exigibles dans la répartition. Les primes de rendements, l’assurance scolaire, la pharmacie, le matériel didactique, la bibliothèque, la coopérative scolaire, les carnets de notes séquentielles, les cartes d’identité scolaires, l’orientation scolaire, l’animation culturelle, la matière d’œuvre, les projets d’établissement, sont autant de postes de dépense que devraient ravitailler cet argent qui jusqu’aujourd’hui continue de se balader dans le circuit administratif.
C’est dire simplement que des milliers d’élèves qui marchent dans la rue pour l’école ne sont jusqu’ici couverts par aucune assurance. S’il leur arrivait un accident sur le chemin de l’école, il n’y aurait aucune prise en charge, les parents supporteront seuls les dégâts, alors qu’ils ont payés pour leur assurance depuis septembre 2018. C’est dire que dans les établissements d’enseignement techniques, il est encore impossible d’acheter de la matière d’œuvre pour un cours pratique, pourtant dans la politique nationale ont dit former des enfants pour être compétitifs dans le domaine des technologies, c’est dire qu’à ce jour il est virtuellement impossible pour l’infirmerie d’un établissement de donner le premier comprimé à l’élève ou d’assurer un premier pansement en cas de blessure avant de le référer ailleurs.
Le premier trimestre qui est le plus long est terminé, le deuxième est surplombé des journées pédagogiques et des fêtes. L’année scolaire est ainsi presque achevée, et les établissements scolaires secondaires attendent encore l’argent pour le fonctionnement, à cause une fois de plus des mesures gouvernementales prises comme d’habitude dans la précipitation, sans au préalable être assuré d’en avoir maitrisé tous les contours de l’applicabilité.
Roland TSAPI