128. C’est le nombre des associations officiellement reconnues au Cameroun par le ministère de l’Administration territoriale et de la décentralisation sous la rubrique « confession religieuse ». Entendez par confession religieuse, l’appartenance à une religion donnée. C’est dire chacune de ces confessions à une croyance différente, ou quelque chose de particulier qui la distingue des autres. Sur le plan légal il n’y a rien à redire sur la multiplicité de ces confessions, puisque c’est un choix de l’Etat. Le préambule de la Constitution de 1996 dit que L’Etat est laïc. La neutralité et l’indépendance de l’Etat vis-à-vis de toutes les religions sont garanties, la liberté du culte et le libre exercice de sa pratique sont garantis, et enfin nul ne peut être inquiété en raison de ses origines, de ses opinions ou croyances en matières religieuse, philosophique ou politique sous réserve du respect de l’ordre public et des bonnes mœurs. La plus ancienne des confessions, et la plus connue aussi, est l’église catholique romaine, qui s’est implantée au Cameroun en 1890, donc il a 127 ans aujourd’hui, avec la création par le pape Léon XIII de la préfecture apostolique du Cameroun.
L’Eglise évangélique du Cameroun, l’une des plus importantes confessions est officiellement née en 1956 après une conférence à Foumban qui a permis aux pasteurs camerounais d’affirmer leur maturité à gérer la congrégation sur le plan local, au même moment que l’Union des Eglises Batistes du Cameroun. L’islam quant à elle, était déjà présente dans la région septentrionale du pays bien avant l’arrivée des Allemands en 1884. Les lamidos et sultans qui étaient les gardiens de cette tradition religieuse n’ont pas été inquiétés par le colon par la suite. Que dire de l’impact de cette longue histoire des religions sur la vie des Camerounais depuis qu’ils sont en contact avec elles ? Les principaux dirigeants de ce pays sont réputés avoir été éduqués par ces trois grands courants religieux, dont les enseignements sont basés sur la construction de la paix, la recherche du bien-être de tous, l’application de la justice dans tous les actes de la vie. On ne peut pas dire sans risque de se tromper que ces dirigeants on appliqué ces principes religieux dans leur mode de gestion, pour assurer un bien-être de tous. Aujourd’hui et de manière officielle donc, il existe 128 « églises » différentes qui professent chacune une façon de croire, et même ce en quoi il faut croire. En plus du siège qui est indiqué dans le décret d’autorisation, chaque confession a en plus le droit d’ouvrir les branches partout sur le territoire, en fonction de ses moyens et de ses capacités à recruter les « clients », ou les fidèles comme ils appellent. D’où la prolifération partout.
Quelques appellations pour que l’on apprenne un peu : Filles de Jésus avec siège à NGaoundéré, Filles de Marie avec siège à Yaoundé, Filles de Notre Dame du Sacré Cœur de Jésus avec siège à Yaoundé, Fraternités des Petits Frères de Jésus avec siège à Yaoundé, La Sainte Métropole Gréco-Orthodoxe du Cameroun avec siège à Yaoundé, La Vraie Eglise de Dieu du Cameroun avec siège à Yaoundé, Société de Jésus Réparateur à Yaoundé, Société des Missionnaires Oblats de Marie Immaculée à Garoua, Les Témoins de Jéhovah du Cameroun… La liste est longue, les appellations aussi, aussi curieuses les unes que les autres. De sorte que Jésus, Mohamed ou tout autre leader religieux se perdrait simplement. Il faut relever que la plus part de ces dénominations sont nées des divisions dans les églises dites classiques. Les Protestants qui se séparent de l’église catholique, et les églises réveillées qui se démultiplient à partir des protestants. Questions, pourquoi l’église dont les précurseurs prônent la paix est elle aussi divisée aujourd’hui ? On comprendrait encore qu’elle se divise seulement en son sein à cause du caractère imparfait de l’homme, mais le plus grave c’est qu’elle est devenue source de division : division entre mari et femme, division entre frères et sœurs, division entre parents et enfants, division entre communauté. Aussi, plus les églises se multiplient, plus la morale disparait de la société.
L’église réveillée est venue endormir les gens plus qu’ils ne l’étaient avant. Elle donne l’impression aux fidèles qu’il faut se réveiller et chanter à la gloire de Dieu, et pendant que ces derniers chantent et dansent, c’est là où on les endort debout et leur soutire même la moindre intelligence. La ville de Douala a encore connu un cas la semaine dernière, avec cet homme qui a perdu sa femme sortie un soir pour aller rencontrer le pasteur, lequel devait prier pour détruire en elle le virus de l’hypertension et du diabète, selon ses dires. Vous avez bien compris, dans ces églises, l’hypertension et le diabète sont causés par un virus. Et cela devait se faire comme d’habitude à l’insu du pauvre homme, désormais considéré chez lui comme le démon par sa femme et ses propres filles, l’ange étant le pasteur à qui il faut désormais obéir au doigt et à l’œil. Une famille qui se disloque à cause de dieu, la société qui se désagrège à cause de dieu. Il est plus que temps que chacun marque un temps d’arrêt et se pose la question : quel dieu je sers, celui de la division ou celui de l’union. Dieu ne peut être au service du mal.
Roland TSAPI, Journaliste