Après deux ans d’incarcération, Mme Victorine Tafor Shiwo, directrice de l’école privée bilingue Divine Grace de Kano et Mme Chah Josepha Ndai, maitresse dans ladite école ont été déclarées non-coupables par le tribunal de grande instance du Lom-et-Djèrem.
La salle d’audience du tribunal de grande instance du Lom-et-Djèrem, statuant en matière criminelle était remplie d’émotion mercredi 02 avril 2025. Lorsque les juges de la collégialité constituée de Mme Josiane Owoutou Owoutou, de Rodrigue Victor Adoueme, et de Jean Louis Tazovap ont prononcé leur verdict, le sourire et la joie étaient sur tous les visages. Les deux enseignantes qui ont toujours nié les accusations portées contre elles, étaient très soulagées de retrouver la liberté. Leurs familles, les amis et proches qui étaient également dans la salle d’audience n’ont manqué d’exprimer leur soulagement. « Les mots me manquent pour exprimer la joie qui m’anime. Elle est immense. Le fait de déclarer nos deux collègues non-coupables prouve que nous pouvons encore compter sur la justice de notre pays et que Dieu est vivant. Peu importe le temps, il finit toujours par agir », a déclaré Mme Liliane Zoah, enseignante à la maternelle. Pour Simon Fridolin Nyo, chef du personnel du groupe scolaire bilingue Divine Grace, « l’absence de nos deux collègues pendant ces deux ans a laissé un grand vide dans notre école. Nous rendons vraiment grâce à Dieu pour ce qu’il a fait pour nous aujourd’hui ».
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Au terme d’un procès d’une dizaine d’audiences à huis-clos, du fait que la victime soit mineure, et de deux descentes judiciaires sur le terrain, le tribunal de grande instance du Lom-et-Djèrem a conclu que les preuves présentées n’étaient pas suffisantes pour établir la culpabilité des accusées. « Je suis très surpris par la décision qui a été rendue. Nous-nous attendions à mieux, au regard des sévices que l’enfant a subit. Ce n’est qu’une première décision mais, nous avons encore dix jours pour interjeter appel et faire valoir nos arguments devant la chambre criminelle de la Cour d’appel de l’Est, pour corriger cette décision qui nous semble très injuste », a déclaré Me Judicaël Kossa Kabega, Avocat au Barreau du Cameroun pour la partie civile. Du côté de la défense, Barrister Joseph Awah Fru, Avocat international au Barreau du Cameroun, du Nigéria et aux Etats-Unis, estime que « les accusations portées contre les deux enseignantes n’avaient pas suffisamment été étayées pour justifier une condamnation. La justice a bien fait son travail, et je ne peux que me réjouir de ce verdict ».
Deux ans en prison pour rien
Suite à une déposition faisant office de plainte faite par Blandine Bella Ndel Nyaze, en date du 11 décembre 2023, à la brigade territoriale de gendarmerie de Yadémé à Bertoua, Mme Victorine Tafor Shiwo, directrice de l’école privée bilingue Divine Grace et Mme Chah Josepha Ndai, maitresse dans ladite école ont été mises aux arrêts. La génitrice de la fillette de 4 ans alors élève en class One accuse les deux enseignantes d’« outrage à la pudeur sur mineur suivi de viol ». Les faits présumés auraient eu lieu dans ledit établissement scolaire le mardi 5 décembre 2023. La version des faits relatés par Blandine Bella Ndel Nyaze dans sa plainte est que « ma fille est rentrée de l’école ce jour vers 15 heures. Une fois à la maison, elle m’a fait savoir que ses fesses font mal ». C’est ainsi qu’elle contrôle le postérieur de l’enfant et constate qu’il y a « une boule de sang qui recouvre son vagin ». Effrayée, elle commence par interroger l’enfant. « Ma fille m’a dit que c’est la directrice, sa maitresse et sa camarade Meka qui ont introduits leurs doigts dans son vagin, en tournant dans tous les sens à l’intérieur, en la faisant coucher sur un banc », peut-on lire dans la plainte. Après ces déclarations, l’enfant est immédiatement conduit à l’hôpital régional de Bertoua pour être consulté. Selon les constations faites par deux médecins, l’un certifie que « le col de l’utérus est retourné », et l’autre « qu’il s’agit d’un caillot de sang ». L’échographie réalisée montre que « l’utérus est en place ». Informé, le délégué de l’éducation de base est descendu dans cette école à la surprise des enseignants et de la directrice qui avaient déjà libérés leurs élèves. Ici, personne n’est au courant de cette sordide affaire. La directrice et l’enseignante incriminées nient les faits et affirment que l’élève en question est parti de l’école sans un moindre souci de santé après avoir composé normalement. Flou total, même si le certificat médico-légal délivré le 06 décembre 2023 parle d’une « perforation hyppeneale + prolapsus utérien ». L’enquête ouverte sera rapidement bouclée avec les auditions, de la petite fillette, de sa génitrice et des accusées. Le 19 décembre 2023, les deux enseignantes sont placées sous mandat de dépôt à la prison centrale de Bertoua en attendant que la justice table sur l’affaire.
Ange-Gabriel OLINGA BENG