Du 24 au 26 octobre prochain, la salle du Parcours Vita vibrera au rythme des chants, danses et symboles du peuple Koh Zimè.
Sous la lumière naturelle de la salle de conférences du Parcours Vita, quatre figures du peuple Koh Zimè siégeaient, dignes et unies, à la table d’honneur drapée d’un pagne symbolique. Sur le tissu, les noms des clans tissaient les racines d’une mémoire enracinée dans la forêt de l’Est. Devant eux, les objets sacrés du quotidien : calebasses, lampes à pétrole, panier en raphia et plateau rituel, composant un autel de la parole et de la continuité. Derrière, la banderole s’élevait telle une proclamation, « Un peuple, une identité, un destin ».
C’est dans cette ambiance de conférence de presse à la fois sobre et majestueuse qu’a été annoncée la 3e édition du Mini-Festival du peuple Koh Zimè, organisée par l’association culturelle Kol Éloh. Ceci est un prélude à la 6e édition du grand Festival National du Peuple Koh Zimè, qui se tiendra en décembre 2025 à Lomié (région de l’Est du Cameroun), berceau spirituel du peuple Koh Zimè. L’association culturelle Koh Éloh, voix fédératrice des communautés Koh Zimè du Cameroun, du Gabon, du Centrafrique et du Congo, a pris la parole au travers de Mane Hans Wilfried et Beye Idriss, deux figures marquantes, pour rappeler l’enjeu qui est celui de restaurer la fierté d’un peuple que la modernité a trop souvent effacé derrière les clichés de la « forêt » et du « primitif » a déclaré Hans Wilfried M.
« Nous ne sommes pas des vestiges du passé, mais les gardiens d’un savoir vivant », déclare dans un ton incisif, mais serein, Beye Idriss, président du comité technique d’organisation du Mini-Festival.
Peuple des confins équatoriaux, les Koh Zimè partagent seize langues, mais un seul souffle. Leurs parlers se répondent comme les rivières d’une même source, et leur pharmacopée, riche et subtile, puise dans les arbres guérisseurs de la grande forêt , renseigne Hans Wilfried Mane. Ce lien à la nature n’est pas folklore : il est science et spiritualité, il est identité. Ainsi, le festival devient un espace de réparation symbolique.
Face aux défis de la modernisation et de l’acculturation, l’association Kol Eloh revendique une réponse : l’action culturelle comme survie collective. « Beaucoup d’entre nous vivent aujourd’hui loin des villages, mariés à d’autres communautés, plongés dans l’anonymat des villes, confie un responsable. Le festival nous rassemble pour que nos enfants sachent d’où ils viennent », affirme Hans Wilfried Mane.
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Le Mini-Festival Koh Zimè de Douala se veut à la fois festif et réflexif. Il accueillera, du 24 au 26 octobre, au Parcours Vita, un programme dense. Notamment, le Lancement officiel et parade majestueuse des chefs parés de leurs attributs sacrés ; Conférence-débat sur le thème : « L’identité culturelle face aux défis de la modernisation » ; des danses traditionnelles, luttes rituelles, jeux de société, ateliers de transmission ; des expositions de pharmacopée, démontrant les vertus thérapeutiques d’un savoir ancestral ; le concours de Miss Koh Zimè, où la beauté intérieure et la maîtrise de la langue maternelle l’emportent sur les artifices esthétiques. Pour Bissa Olene, présidente de la commission jeunesse, trace la philosophie : « Nous valorisons la jeune fille non pour sa beauté physique, mais pour sa maîtrise des valeurs. Une femme qui parle sa langue et connaît l’art culinaire de son peuple est déjà une reine », dit-elle.
À travers les voix de Ngo Biti Anne et de l’ensemble des membres du panel, un appel vibrant a été lancé à la communauté installée dans le Littoral : « Frères et sœurs encore dispersés dans les quartiers de Douala, rapprochez-vous de votre communauté. Venez nombreux au Parcours Vita. C’est notre devoir de mémoire, notre fête à tous », ont-ils scandé à tour de rôle.
Entre mémoire et avenir
De la lampe à pétrole à la calebasse, des tissus imprimés aux chants polyphoniques, tout dans cette mise en scène respire le respect du sacré et la conscience du temps. Le Mini-Festival du peuple Koh Zimè n’est pas qu’un simple événement culturel : c’est une parole debout, une mémoire qui s’éclaire, un peuple qui refuse de disparaître.
« Les peuples qui oublient leurs racines, écrivait Mongo Beti, se condamnent à mendier leur place dans le monde. » À Douala, le peuple Koh Zimè a choisi de se souvenir pour exister. Mais aussi, d’exister pour rayonner.
Cheikh Malcolm Radykhal EPANDA