Avec la fin supposée des rivalités Est-Ouest, les espoirs étaient grands de voir se dissoudre le carcan qui de toujours anesthésiait les velléités d’émancipation des États faisant jusqu’alors partie du tiers monde. Un nombre incalculable d’opportunités de croissance se présentait, tout comme semblait s’élargir la panoplie des alliances, pour ces États qui pouvaient dorénavant se mettre en devoir de concrétiser leurs ambitions de souveraineté et de prospérité, sans craindre de provoquer le courroux d’aucun tutorat.
Mais la multipolarité, triomphante à ses débuts, doit aujourd’hui faire face au retour en force des vieilles pratiques hégémoniques. À l’interventionnisme militaire, aux pressions politiques et économiques d’usage déjà ancien, viennent s’ajouter des pressions juridiques. Révisions ou ruptures unilatérales d’accords de partenariats, imposition de sanctions, jugements arbitraires, accusations diffamatoires, tous les prétextes sont bons, surtout les plus fallacieux, tant qu’ils servent à faire valoir les droits putatifs des plus puissants.
Repartie de plus belle, la compétition est aussi plus impitoyable, plus dévastatrice, la joute monopolistique devenant d’autant trouble à mesure que s’y invitent les États parvenus au seuil de puissance. En effet, la multiplication et l’itinérance des guerres sous faux drapeau conduites par des sociétés militaires privées et des groupes armés terroristes, peinent à masquer les appétits des gouvernements volant au secours de leurs multinationales engagées dans la course aux ressources naturelles ou aux débouchés commerciaux.
Ainsi pris en tenaille entre le marteau d’une bipolarité combative et l’enclume d’une unipolarité agressive, de nombreux partisans de la multipolarité sont en recherche de survie. À l’évidence, l’actuel désordre mondial offre une magnifique fenêtre d’opportunités à toutes sortes d’aventuriers, plus assoiffés des confortables rentes financières qui leur sont promises, que du bien-être des peuples dont ils se proclament les libérateurs.
Dans l’environnement planétaire présentement en recomposition, le Cameroun se trouve malheureusement au cœur du Golfe de Guinée. Un point de confluence de nombreuses routes commerciales terrestres, maritimes et aériennes, un gisement géant de toutes sortes de ressources naturelles, et partant, un point de convergence des toutes aussi nombreuses convoitises.
Et à l’instar d’autres pays d’ici et d’ailleurs victimes des conflictualités asymétriques portées par de fausses idéologies fondamentalistes ou séparatistes, le Cameroun est confronté à des desseins de balkanisation à partir de ses régions administratives de l’Extrême-Nord, du Nord-Ouest et du Sud-Ouest. Car loin de porter un quelconque projet de société puritain ou émancipateur, ces mouvements séditieux nés hors de nos frontières, ne sont en réalité que les bras séculiers d’anciennes puissances nostalgiques des temps de leurs hégémons monopolistiques. La situation n’est pas différente dans bien des États proches, frères ou amis, soumis aux mêmes pressions et aléas asymétriques.
Disons-le clairement. Les ambitions souverainistes de nos pays ne sont pas du goût de tous. Ces projets sont en soi des enjeux d’ importance telle que certains ténors du vaisseau communauté internationale prennent sur eux d’en empêcher la matérialisation, au prix d’invasions militaires s’il le faut, nonobstant les coûts humains et matériels de telles initiatives dont les succès ne sont nullement garantis, en tout cas en ce qui concerne l’Afrique noire. En attendant, et comme pour préparer le terrain, ces puissances vont continuer de provoquer des lignes de fracture dans le granit de nos cohésions nationales, objectif poursuivi aussi bien par les groupes armés terroristes que par des cercles capitalistes et mercantilistes, voire dans certains cas ethno-tribalistes.
Si par la volonté de quelques-uns le spectre de la colonisation refait surface, il importe pour nous de ne pas laisser cette douloureuse réalité, se transformer en une imparable fatalité. A nous de défendre nos souverainetés.
Sachons définitivement rester vigilants. /-
Capitaine de Vaisseau
ATONFACK GUEMO
Chef de Division Communication – MINDEF