Elle fait parler d’elle depuis quelques mois déjà. Journaliste-reporter au journal Le Messager et artiste musicienne, Ady Tchoukak a officiellement présenté son premier album de 9 titres le 19 janvier 2017 à l’institut français de Douala, près de six mois après sa sortie. Maîtresse de sa scène, l’auteure de «Ya Zaelee » a transporté son public vers une aventure mélodieuse acoustique, accompagnée de sa voix suave et romantique, agrémentée des rythmes locaux et d’ailleurs. Fidèle à sa tradition, Ady a bien voulu s’ouvrir à votre journal. Elle livre dans cet entretien sa source d’inspiration, ses ambitions, ses choix…
Votre premier album baptisé « Ya Zaelee » a été officiellement présenté jeudi 19 janvier dernier à Douala, est-ce pour vous un ouf de soulagement ?
Un ouf de soulagement peut-être parce que j’ai pu franchir cette étape. J’ai bien la tête sur les épaules et je sais où je vais mais pas jusqu’où parce cet aspect relève de la main du Tout Puissant. L’album est là depuis juin 2016, il fallait bien que je le présente de façon officielle. Je l’ai fait et les gens ont bien aimé. Les retours sont positifs jusqu’ici. La petite timide sur scène des premiers jours, se déploie de mieux en mieux. Ceux qui étaient là, ont passé un bon moment et quand le spectacle est fini, personne n’a voulu rentrer. Le public a exigé qu’on bisse quelques titres. Je pense que c’est le début d’une belle aventure où je pourrai partager avec le monde toutes les idées de chansons et scènes qui brulent en moi. Egalement tous mes thèmes et convictions.
Pour ceux qui vous découvrent, quelle est la petite histoire qui entoure «Ya Zaelee» ?
YaZalee veut dire en ma langue, Mon Jour s’est levé. Il est composé de neuf chansons qui ont en commun, le thème de «l’espoir» et les rythmes World. L’enregistrement de cet album a été financé par des internautes à travers le crowfunding, financement participatif. Ce, à la suite d’un showcase organisé en 2014 où je présentais mon projet d’enregistrer un album complètement live. J’y avais convié des professionnels et journalistes pour donner leurs avis. Les professionnels en premier ont aimé et m’ont donné quelques pistes pour m’améliorer. J’ai publié des extraits du showcase sur internet et grâce à une campagne bien menée, j’ai pu avoir sur le site www.ulule.fr , 2267 euros soit environ 1.500 000 Fcfa pour enregistrer l’album. Au bout des mois de travail en studio au pied du Mont Cameroun à Buéa dans le Sud-ouest, l’album est né.

Pourquoi Buéa et pas Douala ou une autre ville du Cameroun ?
(Sourire !) Honnêtement parce que Douala m’avait déçu. Jusqu’à présent d’ailleurs, le milieu artistique à Douala me fait peur. En fait, pour la petite histoire, quand j’étais plus jeune, je rêvais de m’écouter sur un disque mais je n’en avais pas les moyens. J’avais envie de la faire sur mes propres compositions parce que j’écris des chansons depuis la classe de 4ème. Quand je suis entrée dans la presse en 2008, je me suis mise à économiser et là, j’étais même encore stagiaire. Donc quand Popoli me donnait des frais de reportages, je préférais me priver et faire des sacrifices pour cotiser. Quand mon argent a atteint 150 000 Fcfa, je suis allée le donner à un Tonton bien connu de la musique pour qu’il me fasse une maquette. Il a proprement mangé mon argent et m’a envoyé balader. Je ne me suis pas découragée. J’ai multiplié la même expérience jusqu’à 5 fois sans résultats et j’ai décidé d’arrêter. Donc le jour où j’ai eu en main l’argent des internautes, j’ai prié que Dieu me montre un endroit où on Le Craint. Abraham de l’Ifc m’a dit qu’il connaissait et pouvait tenir au cas où, le patron de M1 studio à Buéa et finalement, c’est là bas que tout s’est passé.
Cet album est connu des mélomanes depuis près de six mois, pourquoi avoir attendu aussi longtemps pour sa présentation officielle ?
J’attendais le bon moment. J’ai essayé l’année dernière mais les conditions n’étaient pas favorables. J’ai laissé les choses se faire et tout s’est bien passé au moment indiqué. J’avais juste besoin d’espace et sono pour m’exprimer. L’Institut français du Cameroun de Douala m’en a donné l’occasion au moment propice et mon équipe et mois avons fait le reste.
Le parcours de «Ya Zaelee» depuis sa sortie, apporte t-il les fruits escomptés ?
Pour l’instant, les mélomanes d’ici et d’ailleurs savourent bien le produit. Mais il est trop tôt de parler des fruits escomptés. L’album n’a que six mois et cherche encore ses marques. Nous travaillons à le positionner et nous espérons que d’ici la fin de l’année, les choses bougeront vraiment. Parmi nos moyens, nous avons les médias, les vidéogrammes, Internet qui est ouvert au monde entier et surtout, plusieurs scènes. C’est l’aspect le plus important à mon avis quand on fait de la World Musique. Il faut bien pouvoir faire du Live et occuper la scène pendant les shows.
Pourquoi avez –vous choisi la World pour vous exprimer ?
Je ne sais pas si je l’ai choisi. Je n’ai pas cherché à réfléchir. Comme j’écris et compose, je chante. Je suis aussi une amoureuse du Rythm and blues. J’exploite toutes mes influences, makossa, jazz, classiques, polyphonie, bikutsi, benskin, etc. pour me faire. Mon expérience aussi en tant que choriste, de journaliste et de curieuse. Idem pour les artistes qui m’ont influencé. Je prends un peu de tous et je me fais.
Vous avez parlé des artistes qui vous ont influencé, peut-on avoir quelques noms ?
J’aime l’originalité et la précision du Soweto gospel choir qui m’a révélé à moi-même. La Grâce de Charlotte Dipanda, l’agilité vocale de Whitney Houston, l’amour de Bebé Manga, le vieux goût «école» des anciens succès, l’indépendance de Kareyce Fotso et Annie Flore Batchillylys. J’aime Beyonce sur scène etc. Il y’en a tellement.
Vous êtes aussi très connue comme journaliste, est-ce que la carrière artistique, maintenant que l’album prend corps, d’Ady Tchouakak n’impacte par à sa «vie professionnelle»?
Evidemment que la musique bouscule beaucoup mes habitudes professionnelles. Mais je gère. J’ai la chance d’avoir un management qui comprend et me laisse de temps en temps faire. J’en suis d’ailleurs très reconnaissante. Comme avec chaque nouvelle habitude, je m’adapte. J’essaie de faire la part des choses, j’ai moins de temps pour moi mais ça va pour l’instant. J’arrive encore à concilier la musique et le journalisme.
Au cours de votre séjour au Mali en tant que journaliste, Ady a aussi brillé en tant que artiste musicienne, qu’est-ce qu’on peut savoir de cette aventure et ce que Ady a ressenti sur une scène en dehors du Cameroun ?
Pour la petite histoire, je n’allais pas au Mali chanter mais bien, couvrir le forum Genre et développement sur l’agro buisines qui se tenait en prélude du Sommet Afrique-France. Mais comme Dieu sait faire ses choses, le monsieur qui nous a reçus, Maïga, découvre que je chante par l’entremise des confrères du Sénégal, Côte d’Ivoire et Gabon. Il décide le lendemain de me présenter aux ministres et organisateurs du Forum. Et le soir même au Gala qui rassemblaient plus 350 invités de plus de 30 nationalités, on me dit tu vas chanter et représenter le Cameroun. Ce, sans répétition préalable avec l’orchestre d’Ali Farga Touré. Entre artistes on s’est entendu et j’ai improvisé sur mon titre «Monod». Que les gens ont beaucoup aimé. Si vous regardez la vidéo sur Youtube, vous verrez que les invités se sont bien amusés.
Entretien réalisé par M.L.M